Il y avait la pluie et le tonnerre. Le duvet humide. L'odeur un peu moisie de la tente. Les rires, les cris, la musique dehors. La fatigue, les yeux qui piquent. Mes pieds tout froids et les éclairs. Je ne parvenais pas à trouver le sommeil. Comme si j'attendais quelque chose. Ou quelqu'un. Cette nuit de 14 juillet me rappelait celle de mes huit ou neuf ans. Un été, des vacances avec mes parents et ma meilleure amie. Un orage terrifiant, comme celui-là. La même peur : une peur de petite fille.
J'étais seule dans ces deux duvets convertis en un seul. A deux doigts de glisser du matelas pneumatique, seule à maudire cette fichue idée de camping. Je ne parvenais pas à trouver le sommeil. Une heure a dû s'écouler, dans la torpeur, dans la nervosité et l'épuisement. De ces instants où le temps nous échappe un peu, où on bascule vers un nulle part, où on n'a plus qu'une vague conscience de qui on est et d'où on se trouve, comme dans du coton.
Et puis, dans le bruissement de l'herbe, j'ai entendu le gémissement de la fermeture éclair, distingué la lueur d'une lampe de poche. Entrevu une silhouette familière. Il est entré dans la tente, a retiré ses chaussures. Il s'est couché à côté de moi, dans ces deux duvets convertis en un seul. Il m'a prise dans ses bras. M'a dit de ne pas m'en faire, et de dormir. Et moi, j'ai béni la vie de m'avoir offert cet orage et cette sensation étrange : celle de ne manquer de rien. J'ai vraiment vécu ça. Un orage terrible, ses bras autour de mon visage, ses lèvres sur mon front, et l'impression que rien ne pourrait m'arriver, que rien ne pourrait nous arriver.
Si la vie est difficile, si l'amour est compliqué, si un jour tout peut être bleu et le lendemain gris, il y a quelque chose dont je suis absolument certaine, malgré le doute et les épreuves... C'est qu'il y a des instants qui valent la peine qu'on s'en souvienne.