Magazine Journal intime

Encore Paris (part two)

Publié le 04 novembre 2008 par Anaïs Valente

Jeudi matin.  Je me réveille au son du ronronnement du fauve noir qui a accompagné mon sommeil.  Le Chat Potté, lui, s'est contenté de sauter, sauter et sauter encore, toute la nuit durant.  La douce odeur des pains au chocolat m'extirpe de ma torpeur.  Petit déj en compagnie de Steph et de son époux, sans oublier les félins.  Le Chat Potté nous fait une sérénade à l'aide de ses yeux implorants (cf le film, identiquement la même mimique). 

Petite toilette de chat, et Steph me ramène à la station de métro la plus proche, non sans m'avoir offert un petit sac cadeau contenant plein de petits trucs sympas et coquins, dont un rouge à lèvres de sa collection.  Un rouge à lèvres très particulier, vous vous en doutez.  Mignon comme tout, discret et très pratique.  Je me surprends à m'investir illico dans une campagne marketing, au son d'un slogan démentiel que je ne répéterai pas ici, de peur d'outrer la bonne société (mais ça parle de rouge, et de lèvres, et de rouge à lèvres). 

Me revoilà dans le métro parisien.  ça devient une véritable habitude.  J'observe, en rêvassant.  Le trajet est long.  Une femme âgée d'une soixantaine d'années, mince comme un clou anorexique, est accoutrée d'une façon intersidérale : pull haut en couleurs, serre-tête fleuri et fluo, surmonté d'un énorme nœud bien raide, totalement perché sur la tête, mini jupe laissant entrevoir des bas autoportants rayés de rouge et de noir avec grosses têtes de mort.  Un véritable spectacle, qui ne manque pas d'étonner une maman et ses filles, toutes trois de bonne famille, blondes et très classiques.  Une classe de petit djeuns très dissipée se fait reprendre par l'instit, qui tente de maintenir l'ordre, en vain.  Gros mots et expressions peu flatteuses à la clé.  Je me terre dans mon petit coin. 

J'arrive à destination, savoir la FNAC.  La foule est dense.  Il semble d'ailleurs que, quels que soient l'endroit et l'heure, à Paris, la foule est toujours dense.  Un enfer.  Je traîne durant deux heures à la FNAC, feuilletant un paquet de livres, zieutant une tonne de DVD, en achetant quelques-uns et surtout, cherchant mon livre, censé être sorti l'avant-veille.  Mais rien.  Je trouve bien la collection au rayon informatique, ce qui est bon signe.  Après trois tours du département livres, je m'apprête à aller demander de l'aide lorsque, soudain (suspens insoutenable), au détour d'un rayon (l'angoisse est à son comble), un rayon nouveautés.  Et sur ledit rayon, des tas de petits livres roses.  Mes livres.  Argh, petite photo vite fait.  Le flash attire des regards étonnés vers moi.  N'appelez pas les pompiers, je n'ai pas pété un câble, je fais juste une photo.  Je passe à la caisse avec toutes mes trouvailles.  Je paie mon propre livre, faut le faire.  Faudra surtout en vendre plusieurs centaines pour récupérer ce lourd investissement en droits d'auteurs, ma bonne Dame.

13 heures, il fait faim.  Et soif.  Je retourne, en métro malgré la courte distance, mais le métro me mène droit au but tandis que mes pieds ignorent totalement l'itinéraire, aux Galeries Lafayette, afin de me sustenter au self.  Par erreur, je me retrouve sur la terrasse et j'en profite pour admirer à nouveau la Tour Eiffel dans le brouillard.  Au restaurant, je ne parviens pas à me décider : lasagnes, radiatoris aux légumes, assiette froide de pâtes et saumon, salade aux lardons, grillade, sandwich... tout me tente... et rien ne me tente.  Je fonds finalement, aussi étrangement que cela puisse vous paraître, pour un gros bol de fruits.  Ne vous évanouissez pas, j'ignore, moi aussi, ce qui m'a pris.  Sans doute l'air parisien.  Moi, manger des fruits !  Et je me régale de ces oranges et pamplemousse dont Lafayette n'a gardé que la pulpe, de ces melons et pastèques juteux, et de ce yaourt aux fruits rouges qui recouvre le tout.  Que du bonheur, ce petit repas inattendu.

Un petit tour aux Galeries, foule toujours intense et insupportable, chaleur toujours suffocante, et retour en Gare du Nord, pour rentrer à ma maison à moi, chargée comme un baudet (mon livre, un guide sur Londres où je vais ce WE, Persuasion de Jane Austen, un calendrier de questions-réponses rigolotes, les Chtis et le coffret la Boum - même pas honte).

Dans le train, chuis toujours côté fenêtre.  A mes côtés, un blond pas très ténébreux, mais il a une bonne tête.  Pour changer, je dois faire pipi.  Derrière moi, un bébé fait ses vocalises "adadadadadadadadada".  Quelques minutes, c'est rigolo.  Une heure trente, ça donne des envies de meurtre.  Derrière moi (l'autre derrière), un homme se dispute par gsm interposé.  Passionnant.  "je te l'ai dit, si je te l'ai dit, je me vois encore te le dire, je t'assure que je te l'ai dit..."  Je ne saurai jamais le fin mot de l'histoire : L'a-t-il vraiment dit ?  Et qu'a-t-il dit ?  Je te quitte ?  Je te trompe ?  J'aime pas ton spaghet bolo ?  Je t'aime ?  Je veux t'épouser ?  J'ai mangé un hamburger ce midi ?  Je vais à Paris ?  Je démissionne ?  Je veux en enfant ?  Je rentrerai tard ce soir ? 

A mes côtés, le blond pas très ténébreux a sorti son laptop et vérifie ses mails.  Je dois toujours faire pipi mais n'ose le déranger.  Il prend ensuite son gsm et se lance dans l'envoi de sms.  Je ne bouge pas.  Enfin, il range le tout, extirpe son lecteur mp3 de luxe, met les écouteurs, lance la musique, ferme les yeux et s'endort.  Catastrophe, je ne peux décemment plus le faire bouger, le pauvre.  Je me retiens donc une bonne heure et tente de me concentrer sur ma lecture d'Orgueil et préjugés. Un quart d'heure avant l'arrivée à Bruxelles, songeant à la route encore longue qui m'attend, je le réveille d'un geste doux sur le bras, le fais se lever, lui écrase le pied et fonce satisfaire ma vessie, enfin.  Quelle aventure.

Une fois arrivée à Bruxelles, je saute, tel un mouton en pleine force de l'âge, dans un train à double étage qui part illico presto vers ma petite ville.  Namur, me voilà.  Comme c'est l'heure de pointe, je me fais toute petite dans un tout petit coin avec mes tout petits sacs, histoire de laisser la place aux hordes de navetteurs (paraît que c'est un belgicisme qui n'a pas d'équivalent en France, mais soit) qui vont surgir incessamment.

Et qui ne surgissent point.  Tant mieux.

Arrive le contrôleur (enfin on dit accompagnateur en Belgique, mais soit) pour me contrôler (logique).  Il scrute attentivement mon ticket, puis me regarde, moi aussi, attentivement et me dit "ma petite dame, savez-vous que vous êtes en première classe ici ?"

Glups.

Grand moment de solitude.

Il voit à mon air ahuri (qui a dit que j'avais toujours cet air là, que je le frappe) que je ne l'ai pas fait exprès du tout du tout, et m'accompagne dans un autre wagon (on dit voiture en Belgique, mais soit), en me faisant passer dans une sorte de trou noir composé d'une plate-forme métallique et de noir absolu.  L'est tout gentil avec moi le môssieur.  Doit se dire que j'ai un léger, tout léger, retard mental et qu'il vaut mieux me ménager.

Me vlà donc en seconde classe et je comprends enfin ma douleur.  C'était bien plus calme en première.  Plus paisible.  Plus aéré.  Plus confortable.  Aurais-je finalement des goûts de luxe ?  Le temps passe, lentement.  Très lentement.  Je me focalise sur Jane Austen et Elizabeth Bennett, histoire de le faire passer plus vite.

A 18 heures, j'arrive enfin at home, fatiguée mais contente de cette petite escapade presqu'improvisée.  Je jette mon barda sur le sol et je m'affale dans mon canapé, heureuse de revoir mon home sweet home et ma bestiole d'amour.

(photos suivront ce soir)



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