Le lendemain matin

Publié le 12 novembre 2008 par Unepageparjour

Début de Habélard et Lola

Le lendemain matin, réveillée par la lumière qui inondait déjà sa chambre, Lola s’énerva contre elle-même. Que de temps perdu ! Pensait-elle. Elle se doucha, s’habilla, emporta au passage une banane, déchiffra à peine le « A ce soir, ma chérie » griffonné par sa mère et courut jusqu’au pré de Monsieur Robert.

Les deux chevaux l’attendaient, allongés sous le soleil léger. Lola escalada la haute barrière de bois et sauta dans l’herbe. Habélard releva la tête, dès qu’il la vit, il se mit debout et gambada à sa rencontre. Que de progrès depuis la veille ! Il avançait par petit bond, la démarche encore maladroite mais ses pattes paraissaient déjà plus puissantes.

Plus Lola se rapprochait, et plus il courait vite. Arrivé à sa hauteur, il posa sa tête dans ses bras. Lola, ravie, restait ainsi longtemps, le jeune animal contre elle, mêlant sa respiration au souffle du poulain. Aicha, amusée, semblait les observer. Elle émit un petit cri, comme un rappel, pour l’heure du repas. Habélard s’en fut tété et Lola avala sa banane. Repus l’un et l’autre, ils se calèrent contre la jument, côte à côte.

Lola laissait ses pensées naviguer vers les nuages d’été qui vagabondaient au dessus d’eux. Habélard s’était endormi. La poulinière aussi, peut-être, juste étonnée de trouver pelotonnés contre ses flancs deux petits. Une grande paix régnait dans ce matin calme.

Plus tard, quand Monsieur Robert entra dans le pré, il s’arrêta net. Il craignit un instant que la fillette se soit trouvée mal. Mais non, pensa-t-il aussitôt, elle souriait dans ses rêves. Il hochait la tête, se demandant quand même s’il avait bien fait la veille de lui montrer la naissance du poulain. Il repensait à sa vieille télé. Oui, il pourrait lui donner. Pour l’occuper. Elle s’ennuie peut-être.

Aicha se réveilla la première, à la vue de son maître. Lola, un peu confuse, se releva bien vite, la peau de la banane collante dans sa main.

Je ne savais pas quoi en faire, s’excusait-elle. Je n’avais pas osé la mettre par terre.

Oh, cela n’aurait pas été bien grave, on aurait bien trouvé un amateur par ici. Allez ! Viens, je vais te donner ma vieille télé et l’installer chez toi.

La petite fille prit un air fâchée. Les adultes l’énervaient, à la longue. Que faire de ces images bruyantes, de ces feuilletons violents et ennuyeux, quand il y a tant de bonheur à vivre par ailleurs ?


Illustration de Coq (c)