Magazine Humeur

L'apprentissage de la vie

Publié le 27 février 2007 par Maldoror

Tandis que je rédige ce petit billet, qui sera court, la télévision diffuse une émission, parfois intéressante : le droit de savoir.

Le sujet : les tribunaux, qui jugent des affaires courantes. Ce qu'on appelle couramment "la correctionnelle".

Quiconque a déjà eu à se présenter devant cette juridiction, sait que ce n'est pas que pour rire. On peut en ressortir entre deux gendarmes, et aller dormir en prison. C'est donc quelque chose de sérieux, évidemment. On y joue sa liberté, son travail, sa vie personnelle et professionnelle.

Et là, il y a 15 minutes environ, un jeune passe. Pour un vol de vélo. Oh, je ne le défends, ni ne l'enfonce. Il a volé un vélo (lévo nu lové, ça marche aussi ?), il reconnaît les faits, il n'y a pas d'ambigüité.

Non, je regarde juste le jeune, les mains entre les cuisses, au chaud dans son jean. Mal à l'aise. On sent le type qui est en train de regarder tout ça se dérouler, en se demandant si c'est bien lui qui est l'acteur principal de cette pièce désagréable. Mais c'est quand je regarde le procureur, une femme, que j'ai le déclic.

Alors, "la procureure", je ne peux pas le dire. Déjà, l'écrire entre guillemets, ça me blesse un peu. Donc, je vais dire "le procureur". Celles qui verront là du sexisme voudront bien me faire part de leurs commentaires, je suis prêt à examiner tous les arguments visant à employer un terme aussi malsonnant que "la procureure".

Donc, le procureur prends la parole. Elle a, allez, disons 3 ans de plus que le voleur de vélo. Elle fait ses classes, voilà, c'est ça qui me saute aux yeux. Elle fait ses classes. Un apprentissage, quoi. Elle est sur une petite affaire, évidemment. Il faut bien commencer petit. Alors elle apprend, et elle réclame douze mois d'emprisonnement, dont huit avec sursis, et quatre ferme. Quatre mois. C'est pas long, quand on est en vacances. C'est 120 journées. 120 journées à Sodome, c'est raisonnable. Enfin ça se discute, disons. Mais 120 journées à Fleury-Mérogis, c'est long, c'est très long. Et le jeune, il a ses mains entre ses cuisses, réfugiées dans son jean.

Il écoute les réquisitions de la jeune procureur (non, je ne peux pas mettre un "e"), il réchauffe ses mains. Ce vélo, il l'a volé, oui. Et il est récidiviste, oui. Le problème n'est pas là. Le problème est que le procureur récite son code pénal comme un enfant de coeur récite son missel, par coeur, comme on lui a appris. Elle apprend. Elle fait ses classes.

L'autre, le jeune, il va les faire aussi, ses classes. Mais en prison. Pendant quatre mois.

Question : quel service ce procureur, trop jeune et trop inexpérimenté, a-t-il rendu à la société, en réclamant ainsi quatre mois d'emprisonnement pour ce jeune, à peine son cadet, sans même concevoir ce que cela signifiait que de vivre durant 120 jours dans une cellule ? Pourquoi confie-t-on les réquisitions, fut-ce au tribunal correctionnel, à des jeunes filles inexpérimentées, qui croient booster leur carrière en enterrant les prévenus ?

Notre institution judiciaire est-elle sorti grandie de cette réquisition, eu égard au prix initial du vélo ?

Des questions. Si vous avez des idées sur les réponses, je suis partant pour en parler.


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