Le Syndrome du Foie Gras

Publié le 17 novembre 2008 par Oskarrnajh

Ca fait 5 ans maintenant que j'ai arrêté d'bouffer des morceaux d'hépatite. J'ai pourtant rien d'un végétarien ; manger du cadavre m'a jamais posé plus de cas d'conscience qu'une poule qui gobe un asticot. Mais je peux pas cautionner l'gavage. Pratiquer la torture, uniquement dans l'but de modifier le goût d'un organe précis, et tout ça pour satisfaire les langues d'un paquet d'enculés d'mauvaise foie - j'aime encore mieux m'exploser la panse au vieux paté Hénaff de cantine scolaire. Le boycot est le seul moyen de mettre fin à cette putain d'masquarade. Evidemment, boycotter, c'est ne pas consommer, mais pour que ce boycot soit efficace, faut aussi en parler et passer l'mot. C'est là qu'on découvre le Syndrome du Foie Gras, ce truc qui contient toute la mesquinerie de l'esprit, toute l'inertie cérébrale et morale dont est capable l'espèce humaine.

D'abord, les arguments contre ce produit ne manquent pas, et sont imparable. Le gavage qu'est une torture inutile, et puis y'a la grosse hépatite qu'on avale en gloussant, le sexage qui consiste à trier les mâles des femelles - celles-ci sont broyées ou gazées, au choix. Ben oui, ces connasses ont l'foie trop "veineux" pour plaire aux langues délicates de nos chères gobeurs de cirrhose. Et tout le monde est forcé d'admettre que le boycot est le seul moyen de mettre un terme à ce gros merdier. Mais voila : le foie gras c'est "bon", et ce p'tit plaisir justifie qu'on se rende complice d'un bon gros massacre organisé, bien industriel.

Les pires, ceux que la moralité travail quand même un peu, ceux qu'ça gratte quand même au fond du cul et qui savent plus trop comment s'asseoir pour être à l'aise, c'est ceux qui cherchent des prétextes. Le premier qui tombe, souvent comme un étron dans l'potage, c'est l'argument du "traditionnel" - argument préféré de ceux qui n'ont pas vu à quoi ressemble l'industrie du gavage, et qui sont généralement les premiers à s'offusquer quand l'reubeu du quartier égorge un mouton pour l'Aïd, ou les Chinois qui mangent du chien. Pourtant, ni chien ni mouton ne sont gavés. Ceux là,on peut tout aussi bien leur rappeler qu'il y a quelque temps, une tradition consistait à crâmer l'village voisin, le piller et bourrer l'cul de tout ce qui s'y trouvait de vaguement féminin.

D'autre se planquent derrière un "mais parait qu'elles souffrent pas, d'ailleurs, quand le gaveur arrive, elles tendent le cou, elles réclament...". Une instruction à peine développée en biologie permet d'affirmer pourtant qu'un foie qui fait 10 fois sa tailles est malade, qu'une grosse chiasse de 10 jours est aussi symptome d'une maladie, et qu'une maladie est douloureuse. Pour le reste, conneries, loin de tendre le cou, l'animal essaie de s'retourner dans sa cage. On préfèrera toujours croire ce trou du cul d'éleveur, évidemment, parce que sa version des faits - aussi ouvertement mensongère soit elle, ménage la sensibilité des consommateurs.

Et puis, y'a l'apathique de base, celui qui est d'accord, qui est dégoûté, mais qui continue quand même à en bouffer, allez savoir pourquoi.


Cette mesquinerie, toutes ces excuses bancales, merdeuses et pitoyables qu'on essaie de balancer pour ne pas s'priver d'un p'tit plaisir à deux balles - c'est ça, le Syndrome du Foie Gras. Et il conditionne le moindre de nos faits et gestes. Il est vrai pour le foie gras, il est vrai pour tout l'reste.