Un article du NYT publié aujourd’hui lève un tout petit coin de voile sur un sujet encore plus obscur que l’influence de l’industrie pharmaceutique sur les médecins : les liens liant cette dernière avec certains journalistes dits « médicaux ».
L’article du NYT fait lui-même référence à un texte publié dans le BMJ du jour (merci Yann !).
Ce dernier cite un certain nombre de conflits d’intérêts pour le moins fâcheux.
La principale chaire de journalisme médical aux Etats-Unis est financée notamment par Pfizer et Glaxo Wellcome. A tel point que le titre officiel du titulaire de cette chaire est « Glaxo Wellcome distinguished professor of medical journalism ».
Je rêve de voir en France une chaire de cardiologie avec à sa tête un « Professeur agrégé Sanofi-Aventis en pathologies cardio-vasculaires ».
Comme le dit suavement l’article du BMJ : “Although there is no suggestion that this sponsorship has influenced the university’s curriculum, we think that it could send a symbolic message to students and engender a subtle sense of loyalty to the industry.”
"...a subtle sense of loyalty to the industry.”. J'adore cette expression qui montre toute la difficulté de reconnaître ces liens d'intérêts qui sont en effet insaisissables, intangibles, presque immatériels, sauf bien sûr dans les bénéfices qu'en escomptent les deux parties. Accepter de dîner avec l'industrie est bien sûr festif et convivial. Si vous interrogez les convives en fin de soirée, qu'ils soient médecins et journalistes, aucun ne reconnaitra l'existence de ce "sentiment subtil de loyauté envers l'industrie". Ce n'est même pas qu'ils le nient, ils n'en ont tout simplement pas conscience, contrairement à ceux qui les ont invités, soyez en certains.
Autre lien “curieux”, l’attribution de récompenses financées par l’industrie pharmaceutique.
Ma préférée est l’« Eli Lilly and Boehringer Ingelheim’s Embrace award » qui récompense, je cite en VO : « Global initiative that recognises accurate, responsible and sensitive reporting on urinary incontinence ».
Une sorte de Prix Albert Londres de l’incontinence urinaire, en somme. Je suis curieux de savoir à quoi ressemble le trophée : une couche en cristal ?
La valeur marchande des différentes récompenses données en exemple par le BMJ s’élève jusqu’à 7500€ (en liquide, ou en voyages).
Et en France ?
Rien, bien sûr.
Toutes ces vilaines pratiques se sont fort heureusement arrêtées aux frontières, comme le nuage de Tchernobyl.
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Conflicts of Interest May Ensnare Journalists, Too
By Roni Caryn Rabin
The New Yok Times
Published: November 22, 2008
Schwartz et al. BMJ.2008; 337: a2535