Magazine Journal intime

Je hais ceusses qui racontent la fin

Publié le 26 novembre 2008 par Anaïs Valente

Oui, je les hais d'une haine haineuse, même si c'est pas charitable du tout, dirait le curé du coin (s'il y a encore un curé dans le coin).

Pas charitable ?  Passque c'est charitable de raconter la fin d'un livre, d'un film, d'une télé-réalité ou de quoi que ce soit d'autre, de faire exploser le suspense insoutenable, de briser tous les espoirs et toutes les illusions ? 

Nan, c'est pas charitable.

Donc ma haine et justifiée.

Y'a, dans le monde, un tas de gens qui prennent un malin plaisir, les sadiques, à tout dire.  Tout ré-vé-ler.

Combien de fois ai-je dû me boucher les oreilles lorsque des copines se racontent tout le déroulé de la Xème saison de Grey's ou de Desperate (sans le second mot vous comprendez ? comme ça je gagne du temps).  Mais quand je sens venir la chose, en général, je m'éclipse, je râle, je n'écoute pas.  Bref, j'agis et j'échappe aux révélations.

Mais il y a des fois où agir est impossible, tant le venin est dispensé rapidement.

Des fois où la bave du crapaud (mon interlocuteur/trice) atteint la blanche colombe (moi).

Des fois où je parle de la prochaine diffusion d'Anna Karenine, et qu'une amie (devenue ex-amie entretemps, la garce), me réplique « joli film, en effet, je te le conseille, dommage qu'elle meure à la fin ».  Aaaargh, je vais la tuer l'étriper la cuire au bain-marie la transformer en pâtée pour rat.  Je rougis, je râle, je vocifère, et elle me rétorque « ben quoi, tout le monde le sait, qu'elle meurt, enfin voyons ».  Ben non, pas moi, chuis inculturée, en tant qu'amie elle aurait dû le savoir.

Des fois où je parle de Pekin Express, qui passe seulement maintenant en Gelbique (je le précise pour les Français qui ont tout vu y'a belle lurette), en disant que j'aime décidément pas cette équipe là du tout du tout du tout (je ne précise pas laquelle sur ce blog, passque moi, je raconte pas la fin alors que la finale est diffusée ce soir, na) et qu'on (je ne précise pas qui, car je crains les représailles très musclées) me dit « oh tu vas être bien déçue, si déçue, tellement déçue ... » d'un air qui signifie clairement et inexorablement que mon équipe maudite va gagner.  Et voilà la moitié (que dis-je 99 %) du plaisir lié au suspens envolé, en un quart de seconde.  Je deviens rouge.  Mauve.  « On » aussi.  Un peu tard.  La moutarde me monte au nez.  Je suis au bord de la crise d'apoplexie.  Soudaine envie de vengeance, mais je ne trouve rien à révéler à mon ennemie (oui, c'est une femme, cela va de soi, qui d'autre qu'une femme peut révéler de tels secrets ?).  Alors je me tais.  Un regard noir suffit.  Il suffit à me faire réaliser qu' « on » n'a pas fait exprès.  Que ce n'était pas malintentionné, même si maladroit.  Que je dois abandonner tous mes plans de vengeance.

Alors je pardonne.  Oui, je pardonne (mais tout de même, entre nous, totalement entre nous, vade retro Mostèkas).

Je pardonne.  Même si ce soir, moi, je sais déjà qui gagne Pekin Express, et que j'en pleurerais des larmes de désespoir.  Ce qui ne changera pas beaucoup mes habitudes, car Pekin Express est l'émission de télé réalité qui me fait le plus pleurer : je pleure sur les rencontres avec les locaux, sur la pauvreté, sur la richesse des cœurs, sur les épreuves, sur le stress, sur les amitiés qui naissent, sur les souffrances, sur les cobayes qui se font manger (bande de sauvages), sur les chats abandonnés (ça c'était l'an dernier), je pleure je pleure je pleure je pleure... Pekin express devrait se faire sponsoriser par Kleenex.

Au moins, ce soir, j'aurai une vraie bonne raison très réelle de chez réelle de pleurer....



Retour à La Une de Logo Paperblog