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Le soleil brûlait

Publié le 26 novembre 2008 par Unepageparjour

Début de Habélard et Lola

Le soleil brûlait ; une boule de feu ardente, énorme, qui roulait au dessus des vallons. Les nuages en fusion se déchiraient lentement, éparpillant la multitude des couleurs dans les vagues du ciel. L’écarlate liquide de l’horizon s’évaporait dans la brume des prés et montaient, comme des petits troupeaux de moutons mordorés, jusqu’au larges bandes effilochées dans lesquelles s’enlaçaient des gris bleus, des violets laiteux, des blancs épaissis. Levant la tête, Lola s’aperçut que le dôme de la nuit restait suspendu, au dessus d’eux.

Monsieur Robert maintenait fermement Aicha dans la pénombre de l’écurie, tandis que Lola prenait Habélard, lui parlant avec douceur, flattant son encolure, caressant de sa paume ses naseaux humides. Mais elle fuyait son regard, qu’elle devinait interrogateur. La porte claqua, comme un adieu. On entendait ruer, derrière.

Le chemin descendait vers les brûlures de l’aube.  La terre, ocre, éclaboussait de feu les sabots du poulain. Des fils d’or encerclaient les prés brumeux. Monsieur Robert, devant, sifflait un air léger. Mais Lola sentait dans son dos le souffle déjà lointain de la jument affolée. Habélard, par moment, tournant la tête à droite, à gauche, se cabrait, hennissait. Elle devinait dans ses yeux monter des flots d’angoisse.

Alors, elle se mit à courir. D’instinct. Se laissant emmener par son corps. Elle avait lâché le jeune étalon. Et elle dévalait la pente ensanglantée par le matin. Sans écouter les cris de Monsieur Robert, derrière elle, qui essayait de la rattraper. Elle courait à vive allure, comme elle savait le faire. Sans technique, avec son envie, sa rage pour unique direction. Très vite, elle sut que Habélard était sur ses talons. Ils mêlèrent leur galop. Leur rythme jumeau martelait la terre. Leur respiration lançait dans l’air les mêmes nuages de vapeur.  Ils avançaient sur une seule ligne, côte à côte, d’un seul souffle, d’une âme unique. La jeune fille et le jeune cheval.

Lola reconnut l’entrée du grand pré. Habélard aussi, peut-être, car il s’arrêta, devant la clôture de bois. Ils se regardèrent. Monsieur Robert arrivait en soufflant, l’air épuisé, le front perlant de sueur, malgré la fraîcheur piquante de ce matin printanier.

Habélard et Lola se précipitèrent en sautillant dans le grand pré. Son herbe restait sombre, malgré l’azur claire qui avait envahit le ciel.

Lola-sevrage

Illustration de Coq (c)


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