Suite du billet sur Bruel, oùsque j'ai failli périr de froid en pleine ville. Nan je n'exagère pas, on aurait pu retrouver mon cadavre tout congelé, à demi dévoré par les loups. Ce billet se terminait par :
« Retour, ensuite, à Namur, toute enneigée. Toute blanche. Comme la voiture de Mostek, qui nous attend au bureau. Gelée. Congelée. Des pieds à la tête. Enfin, des pneus à la carrosserie. Sans oublier les portières. Moustique nous a quittées pour rentrer au bercail. Nous voici, à plus de minuit, seules, dans le noir, dans le froid, grelottant, face à un véhicule qui refuse de s'ouvrir.
La situation est grave ! GRAVE. »
La situation est donc grave, comme je vous le disais l'autre jour.
Nous voilà, seules, abandonnées, en pleine campagne, devant un véhicule hermétiquement clos et totalement congelé. Bon, pleine campagne, j'exagère un tantinet, puisque le bureau est à trois pas et que, afin d'éviter la mort par congélation (ne riez pas, dernièrement, un belge, qui s'était égaré à la recherche de secours dans les bois, après que son véhicule soit tombé en panne, est mort de froid dans lesdits bois, donc le risque existe bel et bien), nous pourrons nous y réfugier et faire quelques heures supplémentaires.
Ça me tente moyen je dois dire. Tout comme l'idée de rester devant cette portière, à vociférer, rire et tenter l'impossible, comme nous le faisons depuis quelques minutes. Quelques minutes qui ont suffi à transformer mes doigts en glaçons. Fait froid, je vous dis. Mostèk n'est pas contente. Surtout lorsqu'elle me montre du doigt ses deux bombes de produits antigel... au pied du siège avant. A-t-on idée, aussi, d'avoir des bombes antigel DANS la voiture, alors qu'il est clair que le gel se produit au-dehors de la voiture, enfin j'imagine.
Bon, la situation est grave, mais pas désespérée. Après avoir essayé en vain d'ouvrir les deux portières, en tirant, tirant et tirant encore, dans un élan de rage, Mostek donne un coup de pied (ou de poing, mes souvenirs sont peu précis, car mon cerveau commençait, à ce moment précis, à refroidir lamentablement). J'apprendrai ensuite que ce petit geste nerveux aura de graves conséquences sur la plastique du véhicule : une grosse grosse griffe pour cette pauvre titine innocente.
Ensuite, elle a une idée lumineuse (passque son cerveau à elle, il bosse encore à temps plein, malgré le froid) : « on » va entrer par le coffre, récupérer les bombes, ressortir, bomber les portières et le tour est joué. Supeeeeeeer idéééééééééée. Mais qui, « on » ? Keskelle entend par « on » ? Elle entend moi, bibi, Anaïs. Ça va pas la caboche des fois ? Moi, entrer par un coffre dans un véhicule, avec mon vieux dos, à mon âge avancé, avec mes guiboles qui ne veulent plus se plier au jeu ? Que nenni. Non, non et non.
Alors, dans un élan courageux, voire téméraire, Mostek s'élance, tel Moïse traversant la mer rouge (oui, bon, mes références sont étranges, je suis d'accord), via le coffre de son véhicule, jusqu'à l'avant, récupère les fameuses bombes et, au passage, tente d'ouvrir les portières de l'intérieur. Elles cèdent. Alléluia, nous sommes sauvées. Et mortes de rire. Dieu, pourquoi n'ai-je pas emporté mon appareil photo pour immortaliser la scène : Mostek, hilare, se faufilant entre les fauteuils, le frein à main et tout ce que contient une voiture normalement constituée. Grand moment.
Ensuite, elle se lance dans une opération encore plus périlleuse : dégivrer le pare-brise, décoller les essuie-glace complètement scellés sur ledit pare-brise, enlever la glace, où qu'elle soit. Et elle est partout, la glace. Quant à moi, petite chose grelottante, je me suis honteusement réfugiée dans l'habitacle, je tremble je tremble je tremble, je claque des dents comme si j'étais devant le pire thriller de toute l'histoire du cinéma (genre Gremlins) et j'attends lâchement que la voiture soit prête... et chauffée. Excuse valable : y'a qu'un seul grattoir, ma bonne Dame.
Une demi-heure plus tard, nous voici de retour at home. Je tremblerai toute la nuit, j'aurai les pieds frigorifiés toute la nuit, je claquerai des dents toute la nuit. Cerise sur le gâteau : ma douche, dans un élan de mesquinerie, refusera de me fournir de l'eau chaude. La sadique.
Quééééééééén aventure. Comme quoi, les congères, les avalanches et les randonnées dans le froid, ça peut arriver même en ville.
Illu de Domie.