Nolde ou la couleur glorifiée

Publié le 09 décembre 2008 par Fuligineuse

Ce qui m’a frappée entre autres, au sortir de l’exposition Emil Nolde au Grand Palais, c’est l’attrait qu’exercent sur moi les peintres qui, comme lui, utilisent avec audace des couleurs violentes et notamment le rouge vif. C’est également le cas de Nicolas de Staël ou encore de Rothko. J’aime le rouge. (Le vin rouge aussi.)

Nolde : Soleil tropical (DR)


Je savais très peu de choses sur Nolde en allant voir cette expo : un expressionniste, que je croyais norvégien (en fait, allemand). J’avais en tête une image de mer, de vague géante, celle qui se trouve justement sur l’affiche. Au commencement, j’ai été déçue, je l’avoue, par les premières salles où l’influence sur lui des impressionnistes et de Van Gogh est encore vive ; trop de pointillisme, trop de fouillis. Mais j’ai commencé à « accrocher » à partir de la salle montrant le grand ensemble de la vie du Christ et les autres toiles d’inspiration biblique, le « Paradis perdu » et surtout « Le Christ et la pécheresse » avec l’extraordinaire visage de profil, quasi horizontal, de la pécheresse :

A partir de là, c’est une explosion constante de couleurs. « Pour Nolde, dit Philippe Dagen (*), l'eau peut être jonquille, le ciel émeraude, les cheveux pourpres, la terre vermillon : son inventivité chromatique connaît aussi peu de limites que celle de Kirchner et du Matisse des années fauves. » Ce sont les séries sur le monde nocturne de Berlin, les masques, les revenants, et aussi toute la moisson que Nolde a rapportée de son grand voyage vers les « mers du Sud » : sur environ un an et demi (en 1913-14) il est parti par le Nord, via la Russie, la Corée, le Japon, la Chine, jusqu’à la Nouvelle-Guinée, et retour par Singapour, Ceylan, Aden et Port-Saïd.

Nolde : Masques III (DR)


Alors bien sûr, tout n’est pas sympathique dans la vie de Nolde, on pense évidemment à sa tentative pour pactiser avec les nazis. Allégeance vaine puisque sa peinture est finalement condamnée comme « art dégénéré » et qu’à partir de 1941 il lui est interdit de peindre. C’est alors qu’il réalise les magnifiques aquarelles désignées sous le nom d’ « images non peintes ». Et pour cela, pour la joie qu’elles nous donnent, il lui sera beaucoup pardonné.
Fuligineuse

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(*) Dans un article du Monde du 30 juillet 08