Well, well, well … On peut dire que ça sera pas un mal de se remettre un peu à notre impérissable œuvre lexicographique, vu le retard qui, déjà accumulé, continue à s’accumuler vers un cumul de retard qui frise les performances escargotesques des quarante extraterrestres qui popotinent Quai Conti. (Popotinent du verbe popotiner* > prochaine entrée etc … etc …)
Pour couronner le tout, nonobstant mon impérial front hiératique, nous n’allons pas puiser dans la liste d’attente dont je fis part il y a quelques définitionnements dans cette même rubrique, non, nous allons promouvoir un vocable qui par là même va passer devant tout les autres au plus grand mépris de la règle « premiers arrivé premier servi » dont je m’émancipe sans plus de formalité grâce à mon droit régalien de faire, comme je l’ai déjà signifié à plusieurs reprises sur ce blog, très exactement ce que je veux.
J’attends toute contestation de pied ferme. On vient de nettoyer les brodequins. La machine à étirer est toute neuve. Et notre exécuteur des basses œuvres est en pleine forme après sa récente cure de désintoxication.
Nota bene : (ce qui ne veut pas dire notez bien bande de benêts), ce nouveau vocable est une production de notre Greg préféré. Nous l’en remercions de toute notre magnificence.
Tigréquer : v.t. ou i (c’est à dire transigeant ou intransigeant). Du non-grec "Grec", qui veut Hellène, ils s’appellent Hellènes, ce sont des garçons pas comme les autres. En effet alors que la moitié de la planète, tandis que l’autre est occupée à ses famines, les appellent les Grecs, eux, depuis bien avant le premier babillage d’Achille, persistent à s’appeler Hellènes. Va comprendre Charles … Le Grec, ou l’Hellène, fut longtemps représenté sous les formes appétissantes d’un jeune homme plutôt bien gaulé, tout nu sous sa minijupe, et très gentil avec les messieurs plus âgés. Lesquels, il est vrai, n’hésitaient pas alors à se faire un petit Hellène, ou à se faire un petit Grec, si vous voyez où je veux en venir, entre deux péroraisons philosophiques dont les richesses n’ont pas encore fini de nourrir nos civilisations actuelles sauf sur TF1 bien sur…
Cette image d’Epinalos, (je vous en prie…), a subi pas mal de changement depuis ces époques lointaines : à preuve l’actualité récente qui nous a montré moult jeunes Grecs, (des deux sexes qui plus est), remontés comme des pendules et activement occupés à tout foutre en l’air pour protester contre les conséquences qu’ils subissent de ce monde meilleur dont les frasques de la finance mondialisée nous fournissent depuis quelques mois un exemple on ne peut plus probant de la déliquescence d’un système dont la corruption, sport national politique en Grèce comme ailleurs, se satisfait très bien pendant que le peuple est à genoux en espérant ne pas avoir à ramper.
Et du préfixe « ti », spécialement promu pour l’occasion, diminutif de petit, c’est dire que si ça continue il va pas rester grand chose.
Le profil conjugable de ce mot étonnant se présente sous la forme d’un verbe afin que nous puissions le conjuguer. C’est, vous le verrez à l’usage, infiniment plus pratique pour tigréquer au passé, au présent, au futur, au subjonctif, au conditionnel, à l’impératif, etc…
Par un long glissement sémantique, mais surtout gastronomique, quand ce n’est pas plus modestement alimentaire, un Grec a cessé de ne représenter qu’un jeune gazou ravissant qui garde ses moutons pendant que Monsieur Aristote se promène dans les alentours en faisant semblant de réfléchir, pour devenir, tenez-vous bien, un savoureux sandwich plein de viande grasse, avec des frites grasses, accompagné de sauce grasse. Un vrai régal !
Eu égard à l’hétérosexualité d’airain de notre Greg préféré, on a bien saisi que son acception du verbe « tigréquer » ne concerne pas un ensemble de galipoises** exécutées en compagnie d’un individu du même sexe, à quelques centimètres près, éventuellement, mais bel et bien l’ingestion gourmande de ce met facilement obtenu moyennant autant de sous que pour un mac machin vomitif, dans une échoppe rudement plus exotique, et dans la perspective d’un plaisir qui peut égaler, si si, celui que procure, nous le savons tous, un bon goulash-cassoulet-choucroute.
Pour ma part il m’arrive de tigrèquer. Je tigrèque, (notez l’inclinaison changeante de l’accent selon la conjugaison, sinon pif paf !), parfois le midi entre deux allées et venues. Pour d’autres allées et venues, force est de reconnaître que le jeune Grec ne courre pas les rues de la capitale de notre hexagone, tout occupé qu’il est sans doute à courir ces jours-ci celles d’Athènes et de Salonique , ainsi qu’évoqué plus haut.
Afin de ne pas encourir les foudres d’une quelconque ligue internationale de défense de l’Hellène dans toute sa dimension, il n’y a rien de réducteur à tigrèquer. Bien au contraire. Cette notion qui imprègne à l’écoute le prononcé de ce verbe est pétrie de bonnes et tendres intentions. La Grèce est un pays que j’aime beaucoup ainsi que toutes ses habitantes et ses habitants. Faudrait juste enlever les karamanlis et les papandréou.
Nous ne saurions terminé cet article sans préciser qu’on peut aussi titurquer. Les ingrédients sont à peu près les mêmes. L’exotisme de l’échoppe ressemble comme deux goutte d’ouzo à celui mentionné plus haut aussi. Et le taux de lipides contenu dans la recette est équivalent dans les deux cas. La seule différence c’est que l’un est Turc et l’autre Grec. Tout terrien normalement constitué sait pertinemment qu’il ne faut pas confondre sous peine de guerre de Troie entre ces deux-là. Ceci étant ça s’arrange un peu depuis quelques temps, surtout depuis que les vieux meurent. Comme quoi à toute chose malheur est bon. On est ainsi susceptible de voir prochainement des Turcs en train de tigréquer et des Grecs en train de titurquer. L’un dans l’autre ce sera un incontestable progrès.
* La la li, la la la ...
**Ca c'est fait !