Ils étaient au bar des fleurs et Marie lui avait dit en souriant.
- - Souvent je me perds de vue.
Sa remarque l’avait pris au dépourvu. Pour éviter le silence, il avait renchéri.
- Achète des jumelles !
Elle n’avait pas trouvé ça drôle, et leur face à face s’était terminé dos à dos.
Il avait essayé de lui téléphoner le lendemain, pour s’excuser, mais il tombait toujours sur le répondeur. Lassé, il avait fini par laisser un message qui disait.
- Désolé pour hier. Rappelle-moi vite, je ne voulais pas te blesser.
Mais Marie n’avait jamais rappelé et il n’avait jamais pu lui expliquer. La vie avait suivi son cours et Mélanie, Julie, Agnès… avaient presque réussi à effacer Marie.
En deux ans, il ne l’avait jamais croisée, étrange dans une si petite ville. Jusqu’au jour où il crut la voir au musée des Beaux-Arts. C’était elle, certainement, il n’y avait qu’elle pour marcher ainsi. Il alla à sa rencontre dans le silence de la salle dédiée aux impressionnistes et il l’appela.
- Marie !
Elle fit volte face.
- C’est à moi que vous vous adressez ?
- Tu ne me reconnais pas ? Antoine !
Elle l’observa attentivement et répondit.
- Non, je n’ai jamais connu d’Antoine.
- Enfin Marie, tu te souviens bien, cette histoire de jumelles, il y a deux ans, et à cause de ces jumelles tu t’es fâchée avec moi !
- Non, je ne vois vraiment pas, désolée ; Antoine, ça ne me dit rien. Mais au fait, votre Marie, qui est-ce qui vous dit qu’elle veut vous revoir ?
Et elle tourna les talons. Perplexe, il murmura « Combien de mensonges faut-il pour faire une vérité ? »
* photo vue sur ce site