Magazine Journal intime

J'ai testé resto grec

Publié le 15 décembre 2008 par Anaïs Valente

Un soir d'hiver (enfin d'automne, mais un soir oùsque ça caille comme en hiver) comme les autres.  Me vlà partie au resto avec deux copines.  Le choix est difficile.  Nous songeons d'abord à un resto mexicain, pour réaliser, au dernier moment, que nous n'avons pas du tout, mais alors là pas du tout, envie de mexicain.  Ni de japonais.  Ni d'italien.  Ni de chinois.  Détour dans les ruelles pour lire quelques cartes.  Soudain, je réalise avec stupéfaction que j'ai une folle envie de mezze.  Aaaaaaaaah, les mezzes, souvenirs de mon adolescence, premier voyage entre djeunes, liberté presque absolue, moussaka, feta, pitta et retsina (en cherchant le mot « pitta », qui ne me revenait pas - neurones en grève permanente - j'ai trouvé sur le net le mot « amygdalopita », un dessert grec dont le nom ne m'inspire pas le moins du monde, trop... hospitalier). 

Aussitôt dit, aussitôt fait, nous voilà dans un resto grec de Namur, le Mykonos, pour ne pas le citer, au sein duquel gravitent deux serveurs aussi âgés que je suis blonde.

Nous commençons la soirée à deux, Mostek et moi, par un apéritif (un kir + un truc dont j'ai oublié le nom, à base de curaçao et de gin).  Dès cet instant, nous réalisons que tout ne se passera pas parfaitement.  Aussi souriant et serviable que soit notre serveur, il n'est malheureusement pas fut-fut.  C'est le moins qu'on puisse dire.  Il se pointe donc avec nos apéritifs et demande, l'air angélique : « pour qui, le kir ? »  « Pour moi », répond Mostek.  Qui reçoit le truc dont j'ai oublié le nom, à base de curaçao et de gin, en toute logique.  Il poursuit « et pour qui, le ... kir ? »  Dans l'intervalle, l'information est parvenue à sa cervelle (comme quoi tout finit par arriver), et il recommence l'opération avec moult mouvements de bras et de verres.  Après de longues tergiversations, nous recevons enfin chacune notre apéritif.  J'en profite pour demander quelques cacahuètes, passque j'ai faim.  Il me propose des olives.  Tope là.

Notre troisième comparse nous rejoint, et, lorsqu'elle commande son apéro, j'en profite pour venir aux nouvelles des olives, apparemment importées en urgence de Grèce.

Ma question doit sembler saugrenue, un peu comme si je commandais un spaghetti carbonara ou une frite sauce biki, passque le serveur ouvre des yeux comme des soucoupes.  Je récapèpète ma question, qu'il ne comprend toujours pas.  Il nous propose une assiette apéritive à base de tsatsiki, feta, olives et truc rose dont j'ai oublié le nom, à base d'œufs de poisson.  Que nous refusons, puisque nous avons commandé des mezzes, composés notamment de tsatsiki, feta, olives et truc rose à base d'œufs de poissons.  Nous voulons des olives.  OLIVES.  O-LI-VES.  Il s'éloigne, semblant avoir compris.  Réapparaît ensuite avec une assiette pleine d'olives... de tsatsiki, de feta et de truc rose à base d'œufs de poisson.  Sacrebleu, comment dit-on « olives, juste olives, uniquement olives » en grec ?  Abasourdies, le souffle coupé et les yeux exorbités, nous n'avons pas le cran de refuser cette assiette non commandée, qui contient ce que nous allons manger en plat principal, et qu'il faudra payer, qui plus est (débiles, nous ?  Euh, oui, sur ce coup-là vous avez raison).

Nous mangeons donc olives (beaucoup trop salées, vraiment pas de bol), feta, tsatsiki et truc rose à base d'œufs de poisson.  Passqu'on a faim.  Passqu'on a besoin de réconfort (je vous passe les détails sur les drames qui font de nos vies ce qu'elles sont).  Et passque, comme Mostek le dit « la graisse/Grèce, ça fait du bien ».  Bon, c'est moi qui ai ri comme une damnée en entendant ce jeu de mots absolument fabuleux, passque Mostek, ben, elle l'a pas fait exprès de faire un jeu de mots (non, tu l'as pas fait exprès, n'essaie pas de le nier ou je te fais avaler dix olives noires trop salées).

Arrivent presqu'immédiatement nos trois mezzes.  Portés par notre serveur chéri, qui s'exclame, l'œil toujours aussi bovin, « les mezzes, c'est pour ... ? ».  Euh.  Euh.  Euh.  Que je réfléchisse.  Pour vous ?  Pour le SDF au coin de la rue ?  Pour le roi des belges dans son palais bruxellois ?  Les trois pour Mostek qui a tellement besoin et envie de graisse, tandis que nous ne mangerons que le pain ?  Ben pour nous, banane flambée au Grand Marnier !

Nous mangeons ensuite olives, feta, tsatsiki, truc rose à base d'œufs de poisson (sentiment de déjà vu à l'apéro...), calamars, scampi (un seul, bande de radins), feuille de vigne farcie et salade.  Un régal.  Je le reconnais, ce fut un régal.  Pour un prix modique : 10,50 eur.  Pas cher ma bonne dame, pour si bien manger.  D'ailleurs, rien que de l'écrire, j'ai soudain une nouvelle folle envie de calamars et tsatsiki.  Le débat est ensuite lancé sur la présence de cet unique scampi.  A croire que c'est la consommation de nourriture grecque qui ramollit les neurones, car ma deuxième comparse (donc pas Mostek, la troisième, celle qui n'a aucun surnom, diantre) tente par tous les moyens d'exprimer son envie, en vain : « ça serait mieux le double de calamars et la moitié de scampis, euh non la moitié de scampis et le double de calamars, enfin non moitié moins de scampis et plus de calamars, euh ».  On a compris : plus de scampis et moins de calamars.  Qu'on se le dise !  C'était bon, c'était chaud oùsqui fallait, froid oùsqui fallait, copieux, et servi avec un sourire (bovin, mais un sourire tout de même).

En conclusion, une chouette soirée, malgré la morosité ambiante justifiée par nos malheurs (non, n'insistez pas, je sais tout mais je ne dirai rien).  Et malgré le serveur au QI de moule ou de brin d'herbe.  Tiens, j'ai déjà entendu ça quelque part...



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