Je suis allée récemment visiter un lieu nouveau, et en même temps fort ancien, puisqu’il s’agit du Collège des Bernardins. Ce magnifique bâtiment du 13e siècle abrite actuellement une exposition de l’artiste italien Claudio Parmiggiani. Trois grandes installations, dont la première, dans la grande nef, n’a pas manqué de m’ « interpeller »… puisqu’il y est fait expressément référence à la suie.
Il s’agit de l’empreinte d’une immense bibliothèque, qui s’étend sur plus de vingt mètres. Réalisée sur place, par la fumigation de 20 000 ouvrages, cette œuvre appartient aux « sculptures d’ombres » de l’artiste. Faite de cendre et de suie, l’image fuligineuse tracée au mur par le feu fait ressurgir de façon suggestive et émouvante la mémoire de l’enseignement dispensé au Moyen-Age au Collège des Bernardins. Extrêmement fragile, l’œuvre est un moment suspendu, une trace, une vision fugitive ramenée de l’oubli par la force de l’esprit et de la mémoire.
La bibliothèque a été le premier élément que Claudio Parmiggiani a choisi pour le lieu, en utilisant le livre comme pierre angulaire, rappelant la vocation initiale du Collège des Bernardins : permettre aux moines cisterciens, dont les abbayes étaient toutes situées en province, de venir étudier à l’Université de Paris. Il reste aujourd’hui l’image d’une bibliothèque, son négatif. Les livres sont présents par leur absence, par leurs traces, « dessinés » après leur retrait.
Très belle également, la composition de lames de verre brisées dressées au milieu des colonnes de la grande nef. Un labyrinthe et une forêt de reflets.
Personnellement, je regrette un peu que l’on ait installé aussi dans cette « grande nef » une sorte de boite carrée contenant la librairie et la cafeteria du lieu, ce qui casse la perspective de cette belle salle. Mais c’est un détail.
Fuligineuse (photos idem)