Elle pense ?? d???autres taches lumineuses, douze ans plus t??t, des t??ches rondes, d???un blond tr??s clair, qui dansaient sur le bois verni du grand bureau ovale du Pr??sident. Ils ??taient l?? tous les deux, pour la premi??re fois. Belletti l?????tonnait. Elle le croyait beaucoup plus ??g??. Mais il semblait aussi jeune qu???elle. Une boule dans le ventre, elle se raccrochait aux cercles de lumi??re, pour ne pas l??cher prise. Belletti avait commenc?? son rapport d???audit. Debout entre le mur et le projecteur, bien droit, il parlait d???une voix haute, tranchante, portant tour ?? tour l???estocade contre chacun des bonhommes rougeauds qui entouraient la table. Le Pr??sident, qui les avaient missionn?? l???un et l???autre pour cet audit sur les dirigeants de sa soci??t??, restait impassible, tel un aigle perch?? sur sa montagne, l?????il fixe, noir, ac??r?? comme une dague. Belletti, presque souriant, sugg??rait les fautes avec ironie ?? mais, Monsieur De Benedetti, il me semble que vous auriez du surveiller ces ratios avec un peu plus d???amabilit?? : ils se sont veng??s, cette ann??e ! ?? ou encore, ?? voyons, Monsieur Delaroche, par quel myst??re les ventes du Nord-Pas de Calais se sont mises ?? suivre cette piste descendante ? ??. Elle l???imaginait, chevalier fid??le ?? la cause royale, v??tu de cotes de mailles, le sabre haut, pourfendant les tra??tres. C?????tait son tour. Belletti avait analys?? les finances. Elle s???attaquait ?? la strat??gie. Ses premiers mots, pareils ?? des pierres, remontaient lentement de sa gorge. Elle se sentait gauche. Malhabile. Le regard de Belletti plongea dans le sien. Comme une funambule, elle s???en servit de fil, pos?? par dessus le vide. Ses mots se firent plus l??gers, plus vifs. Elle parlait de myopie, d???optique de court-terme, d???oubli des valeurs et des principes. Le Pr??sident restait toujours de marbre, ?? l???autre bout de la table. Les gros hommes attendaient leur mise ?? mort. Elle s?????tait rassise. Le silence sondait la salle de r??union. Puis le Pr??sident se leva. ?? Mademoiselle, Monsieur, merci pour ce travail ! ??.
Armance caresse son ventre, en rouvrant les yeux. Une journ??e printani??re de mai, comme les autres, v??tue d???un l??ger voile d???azur bleu, que le soleil transperce d???assauts juv??niles. Elle compte et recompte encore. Vingti??me semaine. D???am??norrh??e. Comme ils disent. Il en reste deux pour l???amniocent??se.
Un nouveau texto de Pascal. Elle ne le regarde pas. Belletti Pascal. Ce n?????tait qu???en sortant de la r??union de rapport d???audit qu???elle avait appris son pr??nom. ?? Je m???appelle Pascal, et vous ? ??. ?? Armance. ??. Puis il l???invita ?? prendre un caf??. Il ??tait press??, un train l???attendait pour une nouvelle mission, ?? Marseille. Elle avait pens?? que cela tombait bien, car elle devait elle aussi partir sur un autre audit. Ils en rirent. Echang??rent leur num??ro. Il a toujours gard?? le m??me, se sourit-elle.