À l’heure où l’on nous parle de « travailler plus », et encore plus avec la crise, et encore plus longtemps avec la retraite à 70 ans, et encore plus souvent avec l’idée de travailler le dimanche, il est bon de rappeler que l’idéologie du travail est une invention occidentale moderne, déjà dénoncée en son temps par un célèbre texte de Nietzsche reproduit ci-dessous, dont je vous invite à goûter chaque mot.
« Dans la glorification du « travail », dans les infatigables discours sur la « bénédiction du travail », je vois la même arrière-pensée que dans les louanges des actes impersonnels et d’un intérêt général : à savoir la peur de tout ce qui est individuel. »
« On se rend maintenant très bien compte, à l’aspect du travail – c’est-à-dire de ce dur labeur du matin au soir – que c’est là la meilleure police, qu’elle tient chacun en bride et qu’elle s’entend vigoureusement à entraver le développement de la raison, des désirs, du goût de l’indépendance. »
« Car le travail use la force nerveuse dans des proportions extraordinaires, il retire cette force à la réflexion, à la méditation, aux rêves, aux soucis, à l’amour et à la haine, il place toujours devant les yeux un but mesquin et accorde des satisfactions faciles et régulières. »
« Ainsi une société où l’on travaille sans cesse durement jouira d’une plus grande sécurité : et c’est la sécurité que l’on adore maintenant comme divinité suprême. »
Friedrich NIETZSCHE, Aurore, § 173.