Soirée diabolique

Publié le 08 janvier 2009 par Blogueusecornue

L’exposition Sympathy for the Devil: art et rock and roll depuis 1967, qu’accueille actuellement le Musée d’art contemporain de Montréal, en est à ses derniers tours de piste de tourne-disque. Raison pour laquelle j’ai décidé de profiter de la gratuité du mercredi soir pour aller y faire un tour. (Et  parce mes congés des Fêtes non rémunérés m’ont totalement fauchée. Mais chuuttt! Ce motif est assez cheap, merci, alors prière de ne pas le révéler à tout le monde. )

Déformation professionnelle oblige, je griffonne souvent notes et croquis lorsque je visite une exposition. Or, étant sortie chez moi en trombe ce matin, j’ai complètement oublié de glisser un carnet dans mon sac, en prévision de ma visite au MACM. Et dieu sait pourtant que ce ne sont pas les carnets qui manquent à ma collection de carnetomane! C’est pourquoi, en allant casser la croûte au centre-ville, j’ai voulu arrêter au Archambault du Complexe Les Ailes histoire de me procurer un énième bloc-notes de fantaisie. Je me suis cependant heurtée à des portes closes pour cause de fermeture. Fermeture qui survient apparemment pour des raisons hors de leur contrôle, si je me fie à l’avis posté sur la devanture de la défunte boutique. Étrange. Et décevant. Car cette succursale me plaisait bien. J’y ai fait de nombreuses découvertes musicales et littéraires et ai été servie par un personnel toujours courtois et hyper motivé (et j’y ai même croisé un certain chroniqueur culturel que je  me pais à bitcher allègrement chaque fois qu’il présente son interlocuteur le yeux rivés sur ses *@$-]bordel `]##* de petits cartons).

Mais bon, revenons à nos moutons. Ou en fait, nos carnets.

Bredouille, j’ai donc décidé de me diriger vers la succursale de la Place des Arts, qui m’emballe moins, car trop exiguë, toujours trop achalandée et dont l’éclairage m’indispose, car trop blanc, trop cru. Impossible de vaquer zènement (!) à mes plaisirs de shopaholic sous une lumière blanche, vive et à la limite, brutale. Je préfère nettement les environnements agrémentés de tons chauds, moins agressants. Plus cozy.

[Je m'égare encore. J'ai cette fâcheuse manie, je m'éparpille. Et il n'est pas uniquement question du fatras qui jonche mes tables et bureaux, ici et là, mais aussi de mes pensées dispersées dans tous les recoins de mon esprit tout aussi bordélique.]

Bon. Un peu de discipline!

Ah oui. La succursale de la Place des Arts. Cette fois-ci, ma recherche n’a pas été vaine. Non seulement j’ai déniché un magnifique cahier orné d’une couverture évoquant le Livre de Kells (oeuvre sensationnelle que j’affectionne particulièrement!), mais également un mignon étui rose pour ranger quelques crayons (je suis parée pour la rentrée qui aura lieu le 13 janvier!), ainsi qu’un bouquin qui m’a paru intéressant, Le Bonheur est entre vos mains. Petit guide du bouddhisme à l’usage de tous (de Dzigar Kongtrül, le genre de nom qui récolterait une méchante trâlée de points au Scrabble).

J’étais donc fin prête à débuter ma visite.

En fait, pas tant que ça.

Je n’étais jamais allée au MACM un mercredi soir, préférant toujours le visiter de jour afin d’aller et venir librement sans me sentir comprimée dans une masse hétéroclite, bruyante et dérangeante. Because je vais au musée comme d’autres vont à l’église, tsé. Les institutions muséales sont mes lieux de recueillement, d’extase, de contemplation. Par contre, les gardes en uniforme ne me tendent jamais d’hostie. Allez savoir pourquoi.

D’emblée je dois admettre que l’exposition Sympathy for the Devil a été orchestrée de manière magistrale. Toutefois, il est assez ardu de l’apprécier à sa juste valeur lorsque des hordes de hiptsers (et wannabe hipsters) prennent d’assaut les salles, Iphone à la main, photographiant leurs semblables, affublés de gigantissimes lunettes (qu’ils auront préalablement chopé à leur grand-mères, bande de vilains garnements) de tricots d’une mocheté à effrayer un toupet de premier ministre conservateur, de jeans hors de prix, enserrant le peu de chair qu’ils nourrissent à coups de chai latté et de cigarettes importées. Le MACM serait-il devenu le repère cool des hippies bourgeois nouveau genre? Meh. Ça leur passera sûrement. (Bitchage pré-menstruel? À peine!)

Trève de médisance.

Organisée par le Museum of Contemporary Art of Chicago, cette exposition est présentée en primeur au Canada. Ici même à Montréal, mesdames et messieurs! Et vous l’aurez sans doute deviné, elle traite notamment de l’analogie et des couplages entre l’art et la musique rock and roll, en présentant un parcours éclaté et les oeuvres les plus diverses. Intéressant, coloré, saturant les sens de stimuli en tous genres.

Si vous voulez en avoir le coeur net, accourez vers le MACM à toute vitesse (en faisant tout de même attention de ne pas déraper sur les trottoirs glacés, hein, je ne voudrais pas être la cause de vos blessures), car l’exposition prendra fin le 11 janvier.

Finalement, ma soirée s’est terminée de manière plutôt insolite. En rentrant chez moi, fourbue mais charmée, j’ai recouvert ma tignasse d’une tuque rouge aux cornes de diablotin en sortant du métro.  Un type à la démarche claudicante s’est faufilé devant moi, puis, après un moment, a stoppé net et s’est retourné. Il m’attendait, vraisemblablement. Lorsque je suis arrivée à proximité de l’homme, il m’a lancé un regard énigmatique en me demandant sur un ton ésotérico-intoxiqué:

- Eille, es-tu médium?

O_o

Dans la série ça n’arrive qu’à moi, avouez que j’ai le don de me faire aborder par de fameux spécimens issus d’une populace aussi bizarre.