Celle qui jouait la démence
Dans un monastère de femmes il y eut une autre vierge qui jouait la folie et le
démon. On la détesta au point de ne pas même manger avec elle, et elle
préférait cela. Errant donc à travers la cuisine, elle faisait toute sorte de
service. Elle était, comme on dit, l’éponge du monastère, accomplissant en fait
ce qui est écrit : « Si quelqu’un juge à propos d’être sage parmi nous en cette
vie, qu’il devienne insensé pour devenir sage. » Elle faisait donc le service,
la tête couverte d’un haillon alors que toutes les autres sont tondues et ont
des cuculles. Et c’est dans cette tenue qu’elle faisait le service. Aucune des
quatre cents moniales ne la vit jamais en train de manger. Elle ne s’asseyait
pas à table, elle ne recevait pas de morceaux de pain, mais elle se contentait
des miettes des tables et du fond des marmites. Elle n’outragea jamais
personne, elle ne murmura point, elle ne parla ni peu ni beaucoup, bien qu’elle
fût frappée à coups de poing, outragée, chargée d’imprécations et
exécrée.
évêque Pallade :
vies
d'ascètes et de Pères du désert