Mais Garmin est là. Garmin veille. Susurrante. Murmurante…
Et nous regagnons la seconde ville d’Ecosse assez tôt pour y dîner. Ce qui est un bien grand mot. Car ouvrons toute de suite une parenthèse un peu désagréable, (merci : nous avons quand même eu du mal à trouver du plaisir à manger dans ces parages… et hop, refermons la parenthèse), merci.
Nous parvenons donc à nous sustenter de quelques nourritures à peine terrestres, et décidons d’aller boire ailleurs. Un premier bar très sympa et rigolo. Il s’y est même trouver une fille pour me mettre la main aux fesses en remontant des toilettes : non mais je vous jure ! Jusqu’où s’arrêteront-ils ? Cependant c’est un peu bruyant… Nous quittons l’endroit, sans savoir que ça va être pour l’envers. A quelques rue de là, une devanture sobre, dans le haut de Holland Street : nous rentrons, longeons l’immense bar au centre, parvenons à nous y faire une petite place : et en fait nous sommes à quatre pas d’une scène où ça joue. Greg ressort pour téléphoner. Je commande des Mac Ewans. Et, comme je disais, ça joue. Trois keums, âges oscillants entre soixante et soixante-cinq ans, un à la basse, un à la batterie, l’autre guitare-chant : et oh la la oui ! Ca joue ! Ca joue grave ! Du blues mes frères ! Du blues mes sœurs ! Du blues à mourir : le meilleurs ! Du blues qui déchire sa race ! Du blues que t’as rien à faire, ça te racle jusqu’à l’os, ça te serre les tripes, ça t’y enfouit le cœur, ça fait comme un grand pendule baroque et plein de vapeurs dans ta tête, ça te fait balancer à l’intérieur, ça te fait battre du pied à l’extérieur, ça te fait pleurer du bonheur d’être là quand même, d’être là malgré tout, ça te fait pleurer mais ça se voit pas, à cause de la bière qui seule fait briller tes yeux. Ca peut pas être autre chose…
Blues session : les musiciens changent, se succèdent, plus jeunes, ou pas. Et c’est à chaque fois comme ces tours de manèges à la fête foraine : ces trucs tordus dans lesquels tu montes pour avoir peur. Pour gueuler quelques minutes ta trouille du vertige et croire que tu vas pas y survire, mais que tu vas y survivre quand même, parce qu’il va bien falloir continuer. De toute façon.
Et la petite brune un peu ronde qui se pointe au micro, à un moment, et nous lâche un Janis Joplin comme une sublime bulle mauve dans une nuit de nulle part.
Lorsqu’on sort de là, qu’on s’en sort, on ne veut rien d’autre : rien d’autre que se perdre dans les rues. De n’importe quelle ville. Où qu’on soit. Quoiqu’on soit. Et pourquoi faire…
Nous ne nous sommes pas perdus. Nous avons juste failli. Un peu. Nous étions à pied, donc sans Garmin : j’ai le vague souvenir de quelques détours.
Nous nous sommes retrouvés au bord du Clyde, à prendre quelques photos d’un magnifique pont éclairé en rouge.
Et puis nous sommes rentrés à l’hôtel.
Ce soir-là Greg n’avait pas pris son appareil photo. Moi si, néanmoins je préfère en resté au concept que ces articles de voyages ne soient illustrés que par Greg : y’aura quand même une postface consacrée à mes images, rassurez-vous.
Lendemain : nous allons quitter l’Ecosse, après une petit visite au lac Lomond, puis en longeant la cote : je suggère un petit problème de timing quand à bien profiter des deux, vu que le jour s’affale dés 16h30… Donc je suggère …
Ici, une élipse…
Direction Stranraer via Lomond et la côte.
Je vous laisse avec les photos : j’ai encore plein de blues en dedans. Alors c’est beau un lac dans sa douce désolation d’automne. C’est beau le rivage marin léchouillé par une mer calme, une mer de mercure gris bleutée, avec des moutons dessus, et des moutons au bord, avec un ciel de palace de nuées teintées de plomb, qui donne envie d’aller voir la fin du monde pour bien entendu ne la jamais trouvée.
Bon, faut pas qu’on soit en retard à Stranraer : y’a le bateau pour Belfast : ça serait bien de ne pas le rater…