C'était un jeudi matin. C'était d'ailleurs ce jeudi matin, aux alentours de 11h12 ou quelque chose comme ça. J'étais esseulée sur la ligne de caisse et plus exactement à la caisse prioritaire pour les handicapées, celle qui doit rester ouverte en permanence ou du moins le plus possible car j'ai quand même le droit d'aller faire pipi ou caca ou encore d'aller prendre une pause parfois, surtout quand comme moi, on a commencé à 6h du matin par un chargement de deux ou trois palettes de boissons.
Les clients défilaient inlassablement. Bonjour, vous avez la carte de fidélité ? 38 euros 42 s'il vous plait. Merci et bonne journée. Bla bla bla. Gna gna gna. Et puis arrive le gros porc de service. Dans tous les sens du terme. "Se laver" ne devant pas être un verbe qui fait partie de son vocabulaire. Tout crade, puant, avec un ventre énorme et des plaies monstrueuses sur le ventre que même des mouches à merde n'iraient pas s'y coller.
Il a une grosse voix un peu grasse dans le fond de la gorge travaillé à la cigarette et l'alcool, probablement crasseuse également. Je passe donc ses articles, toujours avec le sourire. Je suis commercialement hypocrite, cela m'arrive souvent face à ce genre d'individu. Il commence à me raconter qu'il a tué deux cochons la veille plus le sien. Une bonne bête hein, bien dodue. Il a plein de choses à faire avec, c'est pourquoi il est venu chercher du gros sel et d'autres ingrédient. Monsieur si c'est toi qui découpe et cuisine la viande, je ne veux jamais avoir à y goûter.
Il paie quant tout à coup, telle une illumination dans une pièce sombre, un Eurêka inattendu, une lueur dans la nuit, un pet dans les rosiers, un rat dans la soupe au chou-fleur, il lui prend la terrible envie de me raconter une blague. Je m'attends à tout de la part du personnage. Je prends sur moi et je tend quand même une demi oreille aux propos de l'individu crotté crottant crotteux crotti crotta cracra. Le voilà qui commence. J'ai un peu peur quand même. "C'est un homme qui dit à sa femme : J'aimerais bien te la mettre dans l'oreille". Euh finalement moi je tends pas l'oreille ! "Elle lui répond : ah non tu vas me rendre sourde !". Dites-moi que c'est la fin, dites-moi que c'est la fin ! "Le mari lui dit : pourtant ça fait 20 ans que je te la mets dans la bouche, ça t'a jamais fermé ta gueule !". TADADADAAAAAAAM ! Elégance, charme, beauté, magie, romantisme n'étaient pas au rendez-vous, NON ! Je reste pantoise, conscrite, je souris un peu, je lui souhaite une bonne journée, vite qu'il s'en aille et je passe à la cliente suivante.
J'ai vécu ma toute première blague salace en tant que caissière depuis le début de ma carrière. Mais attention, une blague salace racontée par un gros porc crade et crotté, je dis que ça compte trois fois triple ! Du coup, j'ai largement dépassé le quota et je ne devrais plus avoir à vivre ce genre de moment comment dire de "solitude commerciale". Oui oui, on en voit de toutes les couleurs quand on est caissière.
Gersicotti Gersicotta admire les montagne !
Pondéralement vôtre veut s'envoyer en l'air !