Tout l’or de la montagne

Roc et rage au pays des avalanches.
Le roc a l’avantage de souffrir en silence
du gel.

Nous étions dans le Vercors et la région subissait des intempéries étonnantes, des avalanches de feu provenant des nuages noirs. Je revoyais des personnes perdues de vue depuis le lycée, emportées tour à tour par les langues dévorantes. Elles dévalaient les pentes boisées, les rues du village, alors il s’agissait de trouver un refuge rapidement à chaque nouvelle attaque. Nous avons fini par priviliéger les rochers et leurs recoins les plus profonds. Nous formions un petit groupe de survivants, les cheveux en bataille, l’ivresse de l’aventure et du danger dans le sang, même si la mort pointait son nez à toute heure.

Nous avons investi une vielle maison adossée à la montagne, et son petit réseau de galeries dans la roche. Nous nous sommes organisés, à rapatrier de la nourriture et à mettre en commun nos idées pour tenir un bout de temps, assis autour d’une vieille table en bois. Nous avons même évoqué les chapatis. Tu te trouvais au bout du banc, la tête penchée en avant, et lorsque je suis venue te voir, tu pleurais doucement, sans rage, sans bruit, tes beaux cheveux bruns avaient repoussés suffisament pour cacher ton front. Mais tes yeux, en te tournant, ont témoigné à leur manière de ton désarroi. Et tu ne disais toujours mot.