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Je m’envole pour la première fois

Publié le 07 février 2009 par Unepageparjour

Début de Kira B. Wassa

Kira B.

Je m’envole pour la première fois, dis-je. Quelle sensation étrange ! Comme chaque maison devient petite. On dirait des jouets. Les arbres ressemblent à des brins d’herbe. Comment nous verraient des géants sortis du fond de l’univers ? Sommes-nous si peu de chose ?

Oui, dit B, je t’emmènerai Rue Montaigne. Je t’habillerai de robes de créateurs. Je te chausserai des escarpins les plus chics. Je te couvrirai des coiffes les plus rares. Je t’emmènerai chez un artiste qui transformera ta chevelure en rivage de soie. Je te maquillerai chez la plus douée des maquilleuses. Je te parfumerai des parfums les plus enivrants.

Oui, dis-je. Oh ! comme le fleuve coule de manière sereine et tranquille. Sa trace dessine un sourire joyeux sur la steppe grise, ses eaux radieuses illuminent la forêt d’hiver. Nos enfants connaîtront la Seine et courront l’été sur les bords du Dniepr. Je les imagine déjà, main dans la main, à en perdre haleine, leur pas infinis s’envolant sur le sable pâle des berges.

Oui, dit B., je t’emmènerai partout avec moi, quand il s’agira de négocier des contrats importants. A Paris, à Londres, à New York.  A Dubaï, je te voilerai de manière à ce que tes yeux, comme des étoiles au dessus de la gaze, scintillent de mille fantasmes et que dans leur miroir, les rois et les émirs s’y noient, pour tomber dans mes mains.

Oui, dis-je, nos enfants seront heureux d’embrasser l’Europe, de l’Atlantique à l’Oural, notre maison n’aura pas de frontière, nos murs s’ouvriront sur des milliers de fenêtres, le soleil brillera dans leur regard, ils grandiront fiers de leurs racines multiples.

Oui, dit B., tu marcheras dans ma salle à manger, dans une robe limpide, attirant la lumière légère du printemps. Tu poseras ton corps sur mes sofas, étendue dans des poses avenantes, aux ombres évanescentes, ornant chaque pièce d’une présence douce et irréelle.

Oui, dis-je, j’emmènerai nos enfants à l’école le matin. D’un bisou fier sur mes joues, ils me saluerons, et me sauterons au cou le midi, quand je passerai les rechercher pour le déjeuner, préparé avec ma tendresse de mère. Et le soir, je leur lirai des comptines, des histoires de loups perdus dans la neige de mon pays, qui rencontreraient des petites filles de ton pays, et traversant mille dangers, se transformeraient à la fin en beaux princes charmants, dépositaires d’un royaume enchanté.

Oui, dis B., tu seras ma femme, étincelante entre mes murs, poupée de porcelaine sur mes dentelles aux fils d’argent et d’or.

Oui, dis-je, nos enfants mêleront nos regards, nos mains et nos cœurs, nos alphabets et nos raisons, nos châteaux et nos saisons.

Oui, dit B., mon épouse d’ivoire ciselée.

Oui, dis-je, une mère au ventre vibrant d’amour.

Oui, dit B., mon bouquet de roses blanches.

Oui, dis-je, j’attendrai la fête des mères avec impatience, pour fermer les yeux et écouter l’harmonie que me chanterons nos enfants.

Oui, dit B., ma poupée.

Oui, dis-je, une femme, vivante.


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