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Houellebecq le mal pensant

Publié le 08 février 2009 par Jlk
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Interventions 2 réunit un fatras de textes plus ou moins introuvables, souvent intéressants.
« J’ai la sensation d’avoir participé à des années innovantes et brillantes », déclarait Michel Houellebecq dans un entretien avec Paris-Match en 2006. « Ravalec, Dantec et moi, nous avons regardé le monde en face. Cela manquait dans le paysage… ». Or il y a du vrai dans ce rappel, par Houellebecq, de la secousse qui se produisit, en 1994, avec la parution de Cantique de la racaille, de Ravalec, et de sa propre Extension du domaine de la lutte, dans la foulée de Philippe Djian et avant l’expansion de Maurice G. Dantec. En rupture avec le «politiquement correct» de leurs aînés, ces auteurs, marquèrent une nouvelle façon d’« intervenir» dans les médias, jouant souvent de « provoc ». Citant la mort de Guillaume Dustan, autre provocateur extrême, et celle de Philippe Muray, franc-tireur de la pensée critique, comme un double signe de déclin, Houellebecq constate encore : « On s’est bien amusés, mais la fête est finie. La littérature, elle, continue. Elle traverse des périodes creuses, puis cela revient ».
L’avant-dernier livre publié par Michel Houellebecq, coup médiatique modulant une correspondance assez inepte avec Bernard-Henri Lévy, sous le titre complaisant d’Ennemis publics, marquait une « période creuse » de sa production, et l’on espère que « ça » revienne. Cela étant, jusque dans le bide avéré du film tiré de La possibilité d’une île, et jusque dans ses articles les plus « jetés », l’écrivain reste souvent plus intéressant, plus lucide par éclats, plus original en dépit de ses excès ou de sa mauvaise foi que moult auteurs remuant leur sauce consensuelle. Qu’il affirme que «Jacques Prévert est un con», analyse l’impact du « Surmoi terrifiant et dur » de la publicité, interroge l’architecture contemporaine, le miracle du cinéma muet, l’obsession de la fête et le sexe triste, ou revienne sur ses «dérapages» fauteurs de procès, avant de réduire l’œuvre d’un Robbe-Grillet à une vaine pratique d’agronome, l’affreux ne pense jamais comme il faut – mais il fait penser au moins, agace, stimule !
Michel Houellebecq, Interventions 2. Flammarion, 285p.

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