Il est 4 h du matin et j'ai décidé de venir bavarder avec toi. Attention ! Tu prends des risques ! Vilaine fille ! Victor... Je suis d'humeur très poétique ce soir. Laisse de côté tes sarcasmes... S'il te plaît.
Il est 4 heures du matin. Dehors, tout est calme. La ville dort. La rue entière dort. Et moi, moi j'écris. J'aime écrire la nuit. Je n'en ai pas souvent l'occasion. Mes parents sont en vacances, et ma petite soeur est partie en goguette. J'ai la maison pour moi toute seule. Un délicieux goût d'indépendance, d'autonomie.
J'ai passé une soirée délicieuse. Indescriptible. Mes amis de PE1. Les rires. La joie de se retrouver. Joie d'autant plus forte que... Nous savons tous, chacun d'entre nous, que nous serons bientôt disséminés aux quatres coins du département. C'est la vie qui veut ça. C'est la vie... J'ai ri, discuté, souri. Sans regarder l'heure. Sans penser à septembre. J'ai dansé, dansé, dansé. En oubliant tout. Je n'étais même plus instit', plus personne n'était instit'. Nous étions juste des presque-adultes, heureux de se retrouver. Des presque-adultes profitant de l'instant présent, dans un élan d'amitié fort, très fort.
Je suis rentrée chez moi à 3 h 30. Je n'ai pas eu envie de me coucher, désireuse de prolonger ce moment à ma manière, en écrivant. Portée par la liberté. La liberté d'écrire. Me pelotonner sur moi-même, dans ma mélancolie, dans ma nostalgie. Penser à cette année, qui a passé si vite. Penser à ce qui m'attend, à celle que je serai dans un an. Penser à ceux que nous serons tous dans un an. Ecrire et me sentir bien. Comme si tout avait un sens, soudain. Partir. Il est dorénavant 4 h 18 et je suis bel et bien éveillée. La fièvre de l'écriture a cela d'étonnant qu'elle est un puissant excitant.
Ce soir, je réfléchis à mes doutes. Mon instinct me dit que je continuerai. Parce que je dois écrire. Que j'en ai besoin. Que c'est vital. Ce soir, je suis bien, là, au milieu de la nuit. Je suis seule avec moi-même. Le monde est en suspens. Les volets sont fermés, partout. Il y a juste le ronronnement des voitures, qui passent au loin. Et moi, dont l'esprit vagabonde à la lueur de la lampe de chevet. Mon instinct me dit que je continuerai. Parce que j'aime ça. Que je ne peux pas m'en passer.
J'aimerais demeurer ainsi. Comme si j'observais le monde d'en haut, avec bienveillance. Avec patience. Avec confiance. J'aimerais demeurer ainsi, mes doigts sur le clavier, à me laisser voguer, au gré de la fièvre. J'aimerais demeurer ainsi, tranquille, décrire cette torpeur, modeste tentative, capter l'essence de l'écriture, cet état second dans lequel elle nous plonge. La quiétude qui m'envahit, à 4 h 25 du matin. Je ne dors pas. Je veux juste écrire. Ecrire. Et lâcher prise. Enfin.