Dis moi si tu te souviens qu’un jour un grand t’aurait dit que plus tard « finies les larmes de crocodiles, les larmes tout court, obligation de yeux secs pour ta vie d’adulte »…
Dis moi si là maintenant et quelque part dans ta tête tu serais pas des fois en train de lutter en permanence…avoir soif et trop froid au milieu de la nuit, trouver les gens cons mais toi encore pire parce que t’es dans l’incapacité de leur dire, regarder le monde qui tourne plutôt mal et pas dans le sens où toi tu vas, crever d’envie d’attraper l’autre par la main et lui gueuler n’importe comment « viens on se casse ensemble toi et moi ! » (mais ne jamais le faire, la trouille au bide…), boire comme un ado pour anesthésier et te prendre en plein milieu du front une double barre en acier bien pire qu’inoxydable...
Foirer totalement l’histoire du soir à tes enfants parce que t’es mort de toutes ces conneries qui s’accumulent dans ton intestin (le grêle de préférence pour te plier en deux de douleur après sur ton pieu), les coups de fil manqués (et même parfois les mails) à ceux que tu veux proches mais qui s’éloignent malgré toi en te crispant la nuque un peu plus à chaque fois...
Le café renversé du matin sur le sol de la cuisine et la brûlure sur le dos de la main, la quiche oubliée dans le four à gaz et qui ressemblera plus jamais à un truc comestible, le camion des éboueurs dans la rue et tes poubelles toujours pas sur le trottoir (t’as oublié encore qu’aujourd’hui c’est mardi)...
Faire la cour à des gens que tu méprises au plus profond (mais le faire quand même pour pouvoir garder ton job), mentir effrontément mais ne plus en éprouver de plaisir (parce qu’on en aurait bien passé l’âge), faire le mort et aimer ça…
Dis moi si toujours je tournerai sur moi-même, jusqu’au vertige, la nausée, la perte de connaissance.
Dis moi si pour toi c’est pareil.
Et dis moi aussi à qui on s’adresse…
…pour les réclamations.