Les cimetières, dans Paris, ont de la personnalité. Ils sont fort différents les uns des autres : Montmartre a le nez au vent, Montparnasse est pimpant et intellectuel… Comme “le deuil sied à Electre”, l’hiver sied au Père-Lachaise. La pluie fait luire ses pavés, les quatre vents chantent tristement dans les mausolées qui leur sont ouverts, des grandes croix élancent leurs bras vers un ciel qui, hélas, semble bien indifférent. Dans les allées, on rencontre des touristes (2 millions par an) armés de leur inévitable plan, crapahutant en direction qui d’Edith Piaf, qui de Chopin, qui de Jim Morrison. Le Père-Lachaise aime à chanter. Les amateurs de Géricault rencontrent ceux de Delacroix, les lecteurs de Musset croisent ceux d’Oscar Wilde et Jean de La Fontaine lui-même tient la main de Molière. Rient-ils toujours des mêmes bons mots ?
Il n’y a pas que des touristes, au Père-Lachaise. Il y a aussi les gens tristes, qui viennent rendre hommage à un disparu ou, plus souvent pour une crémation ou un enterrement.
C’est, hélas, à cette catégorie que j’appartiens le plus souvent. Chaque fois, je me dis que ces lieux sont vraiment à la hauteur de mon chagrin. Ils m’enveloppent, me rassurent presque. J’en viens à souhaiter rejoindre ces morts qui ont leur maison qui donne sur la rue le long de laquelle je passe. Certains ont une vue magnifique sur Paris, parfois même sur la Tour Eiffel. Je crois que je vais écrire une “supplique pour être enterrée au Père-Lachaise”…