Dessin Jean Pierre DesclozeauxPeut-être que vous attendez avec impatience un détail croustillant de ma vie (pathétique) du moment. Sûrement, vous n’attendez rien. De toute façon, je ne vais pas vous parler aujourd’hui, ni demain, d’un détail croustillant de ma vie.
Enfin, si. Je me suis inscrite à la bibliothèque municipale pour pouvoir lire des livres et des revues gratuitement. J’ai une carte, bleue, pour ce faire.
Par cette voie, j’ai pu mettre le nez dans le dernier numéro de la revue de littérature étrangère Transfuge et plus particulièrement dans le dossier consacré à : La littérature française est-elle morte ?
A l’issue de la lecture du dossier je dois bien avouer que la réponse ne m’a pas paru bien clair.
Selon Marc Weizmann, les lecteurs, occasionnels ou fanatiques, ne liraient plus de littérature contemporaine pas parce qu’elle est mauvaise mais par snobisme. Au passage avoir des chiffres comparatifs ventes actuelles d’un Balzac vs ventes actuelles d’un auteur contemporain serait intéressant. On aurait un peu moins l’impression de parler d’autre chose que d’un quand dira t-on. Suit dans son propos une charge contre Internet, lieu de l’image, de la glorification de son appartenance (littérature gay, littérature noire, littérature juive, « littérature de femme », littérature monde) et du kitsch de masse. Si la littérature française est morte Internet en est la raison ? La littérature française n’est pas morte, c’est le lecteur qui est snob ? Internet rend la littérature française kitsch, or le lecteur est snob, donc la littérature française est morte ?
Le célèbre François Bégaudeau a aussi participé à ce dossier. Ca commence par un fort contestable être français n’est rien de plus qu’un papier. Selon lui, même la langue, ne nous lierait pas. Pour avoir commencé l’apprentissage du japonais, je suis intimement convaincue que la langue est si puissante qu’elle a forcément un impact sur notre philosophie et notre structure mentale. Donc il pense que la littérature française ne peut pas être morte puisqu’elle n’existe pas. La littérature en langue française serait aujourd’hui moins rayonnante parce que la France est aujourd’hui moins rayonnante ; elle doit faire face à plus de concurrence qu’avant, puisque plus de pays, plus de gens, ont accès à l’écriture et à sa diffusion. Il est finalement rejoint par Yannick Haenel qui fustige une guerre industrielle de la culture dans laquelle les Etats-Unis utiliseraient l’outil « diffamation antieuropéenne » pour imposer leur modèle culturel, outil que les médias français, si bêtes, s’empresserait de relayer à foison. Ainsi, les Etats-Unis, grâce à cette tactique bien connue de ceux qui ont fréquenté les cours de polémologie, la désinformation, auraient pour ambition d’éliminer le produit France.
A celaOliver Rohe répond que ce n’est pas parce qu’on exporte pas qu’on est pas, que les diatribes contre la littérature française contemporaine (autofiction, pas d’histoires, pénurie de génies, repli sur soi, impossibilité de l’universel) ne seraient que des lieux communs. Après tout Faulkner (prix Nobel) n’a pas écrit sur beaucoup d’autres choses que son Sud.
En France problème de rayonnement qui s’affaisse ou problème de talent ? Pour moi, la question est toujours en suspens. Mais si je devais donner une réponse je pense que les talents littéraires français, mais les autres talents aussi, sont tellement peu aidés à émerger, voire ils subissent tellement une société qui n’a de cesse que de chercher à les tuer, à les faire taire, pour donner le pouvoir à une clientèle, un réseau, bourgeois, qu’on perd peu à peu, dans un monde violent et concurrentiel, de notre superbe. Si nous devons nous battre et que nous utilisons un joli petit couteau en argent sans dent et qu’en face ils ont un gros pistolet, que se passe t-il ? Pan. Nous sommes morts.
Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu