IVG : la responsabilité du Conseil constitutionnel

Publié le 09 mars 2009 par Micheljanva

Le Conseil constitutionnel vient d'ouvrir ses archives antérieures à 1984, rendant publiques certaines délibérations décisives. La loi sur l'interruption de grossesse votée en 1974 fût déférée au Conseil constitutionnel. La séance, présidée par Roger Frey, fut introduite à l'époque par François Goguel :

"aucun des problèmes qui ont été soumis au Conseil constitutionnel depuis que j'en fais partie ne m'a paru aussi complexe et difficile que celui de la loi sur l'interruption volontaire de grossesse, parce qu'aucun ne comportait de données aussi diverses, d'ordre moral, d'ordre métaphysique, d'ordre social autant que d'ordre proprement juridique (...). Sans doute sont-ce seulement ces dernières qui doivent retenir notre attention. Mais comment pourrions-nous faire totalement abstraction des autres ?".

Les membres du Conseil étaient pour la plupart contre l'avortement, mais ils se sont efforcés de ne juger que l'aspect de la constitutionnalité du texte. Ils devaient étudier l'objection des 81 députés qui avaient saisi le Conseil et qui invoquaient le préambule de la Constitution : "la Nation garantit à tous, notamment à l'enfant, la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé". Selon François Goguel, le Conseil devait donc trancher pour dire si ces mots désignaient ou non

"un embryon, un fœtus, c'est-à-dire un être qui est potentiellement un être humain, c'est incontestable, mais qui n'est pas encore un être humain au sens plein [sic] du terme".

Pour François Goguel, à la lumière des textes, il n'était pas possible de

"conclure que la consécration de l'existence et des droits de l'embryon humain dès sa conception a une valeur constitutionnelle".

Il proposa donc au Conseil de décider que la loi était conforme à la Constitution. A partir de là, François Goguel formula des remarques personnelles et déplora qu'

"un des traits les plus inquiétants de notre époque consiste dans la généralisation de la tendance à refuser d'assumer la responsabilité des actes qu'on a accomplis".

Une tendance suivie jusqu'au Conseil constitutionnel ! En effet, à l'issue de cette séance qui dura 2 jours, le président demanda au Conseil, de manière exceptionnelle, si un vote devait intervenir sur cette question. Les membres ne souhaitaient pas se sentir personnellement liés à ce texte et l'ont adopté sans vote. Une façon de s'en laver les mains, à la Pilate.

Michel Janva