Encore une fois, j’entends à côté de moi en homme répondre à la question « t’es où là ? » et dire qu’il est en réunion professionnelle alors qu’il se trouve à coté de moi dans un hôtel tendance en face d’une « blonde avec » qu’il aimerait bien tutoyer. Une fille, cela aurait été pareil. De même, en mode attente, il nous arrive de téléphoner à Pierre, Paulette ou Jocelyne, juste pour dire qu’on attend un rendez-vous dans tel ou tel endroit. Plus fort que la géolocalisation,le témoignage compulsif.
Tout cela, nous le devons à la mobilité. A nos téléphones portables. La mobilité a ceci de bien qu’elle développe notre liberté. Même si on est joignable en permanence, on pourrait associer notre mobile à un cordon ombilical avec notre monde, nos relations, nos réseaux, le mobile nous permet de nous dégager de nos contingences.
Mais la mobilité a ceci de tragique qu’elle développe nos inquiétudes. Nous sommes la génération « T’es où là ? ». Comme si nous avions besoin de savoir pour imaginer une réalité, pour nous rassurer. Avec le téléphone fixe, nous savions où arrivait notre coup de fil, avec le mobile, nous savons à qui nous téléphonons. Et cela se rapproche du virtuel. Notre besoin de réalité s’exprime par le « T’es où là » et nous renvoie à notre solitude humanité. A notre terrible besoin de réassurance.
Alors de mon côté, à cette question, je réponds ce que l’autre souhaite entendre.