Tous les maniaques polygraphes dans mon genre connaissent les carnets Moleskine, les fameux petits carnets recouverts de toile noire vernie (oui, ceux avec l’élastique…) L’entreprise Modo et Modo qui les fabrique base sa pub sur une image prestigieuse, Moleskine étant censé être « le carnet d’Hemingway ». Moyennant quoi, chaque utilisateur peut se sentir investi du génie créateur de l’écrivain américain…
Hélas, la légende Moleskine n’est qu’une légende, un mythe que Pascal Riché, dans un article paru chez Rue 89, vient de déboulonner. La firme est de création récente (une dizaine d’années) et l’oncle Ernie, disparu en 1961, n’a certes pas pu utiliser ses productions. Et d’ailleurs, ajoute Riché, « sur quoi Modo et Modo se fonde-t-il pour affirmer qu'il [Hemingway] utilisait un ‘moleskine’ ? Sur un passage de Paris est une fête, où il évoque un carnet de notes sur lequel il rédige une nouvelle. Un peu ténu, non ? Le mot de ‘moleskine’ n'appararaît pas dans ce passage, et Hemingway parle même d'une couverture ‘bleue’ ».
Sur le site de la marque, l’affirmation est certes discrète : « Moleskine® is the heir and successor to the legendary notebook used by artists and thinkers over the past two centuries : among them Vincent van Gogh, Pablo Picasso, Ernest Hemingway, and Bruce Chatwin. » (c’est-à-dire : Moleskine est l’héritier et le successeur du carnet légendaire utilisé par des artistes et des penseurs durant les deux siècles passés, parmi lesquels VVG, PP, EH et BC).
Ce qui est assez amusant, je trouve, c’est que la moitié des commentateurs s’estiment floués et sont déçus. Par exemple : « Crénom ! Je me suis fait avoir ! Et en plus, je n'ose même pas écrire dedans, le prix m'intimide... » Il faut dire que les fameux carnets ne sont pas donnés, en effet ; même s’ils sont incontestablement d’excellente qualité, durables, faits avec du papier de qualité, etc. Mais bon, il faut investir au départ. Etant de nature économe, je n’ai jamais eu de Moleskine que ceux qu’on m’a offerts… Aussi, à ceux qui ne font pas une fixation sur la marque, je signale qu’il existe de jolis carnets noirs du même genre produits par Quo Vadis, le fabriquant d’agendas, sous la référence « Habana » (encore un clin d’œil à Hemingway ?), en vente à 6 euros quelque chose les deux (ci-contre : en format 10 x 15 cm, 96 pages, lignés).
Fuligineuse
Le "fan club" des fous de Moleskine : la Moleskinerie