Mon cher ordimateur,
Je ne sais pas comment t'annoncer ça, j'ai un peu réfléchit pourtant. Je me suis renseigné, tu t'imagines, deux ans que nous travaillons ensemble, sous le même toit, dans les fièvres de la création littéraire assistée par... Deux ans, je me suis habitué à toi, malgré que tu sois étranger et vu comment tu es arrivé ici, sans doute sans papiers. Mais voilà, il va falloir y songer, ne plus tergiverser. Je sais, je te vois clignoter tristement la nuit, émettre de petits sons agaçants quand je me trompe de touches et qu'au lieu de taper Sophocle où discours de la méthode, sur le moteur de recherche, par mégarde je tape, chuche moi châ chaloupe ! Mais n'est pas Achille qui veut, bien que le talon fasse un peu des siennes parfois.
Alors voilà, plus de connections, plus de ces billets d'humeurs qui sont à la littérature ce que les gares sont à l'évasion. "Faites donc des gâteaux au chocolat" me disait il y a peu, une amie mienne. Mais toi, le gâteau au chocolat, je sens bien que ça ne te dis rien. Tant pis, tu ne serviras plus qu'à chercher des recettes de cuisine, à faire des réservations de trains que nous ne prendrons plus. Il n'y a plus que les cons pour prendre ces trains de cons, à télécharger légalement et selon les prescriptions de monsieur Nègre et de sa bande de plagiaires, de petits vampires de la chansonnette qui ne mangent pas de pain, vu que les petits fours sont free, des musiques pour enterrement de stars, des beugleries qui sont à l'art ce que l'auto-collant est à la fresque. Ne soie pas trop triste, la liberté nous la méprisons, elle nous fait horreur. Nous préférons de loin, comploter dans la cuisine en faisant fondre le chocolat :
- T'as vus Sarkozi ? Vite je te dis le napage va pas prendre ! Oh mais moi je te le dis, il va pas faire long feu ! Fais moi confiance, tu vas voir, le premier Mai ça va chauffer ! Tiens, en attendant goûte moi ce petit vin d'un propriétaire que je connais par mon cousin qui est assez ami avec le préfet qui lui même couche un peu avec ma femme, mais tu sais ce que c'est, ton texte il est magnifique mais comme dit ma femme, c'est pas très commercial ! Alors, ce petit vin ?
- Dégueulasse, comme tout ce qui de près ou de loin ressemble à de la foutue vinasse de Frankaouette bien dans ses urnes ! Mais là n'est pas le sujet, chère machine, cher ordimateur.
C'est que vois-tu, au delà du téléchargement, que je ne pratique pas, je me passe assez aisément de ces pirateries de petits bourgeois friqués qui se prennent pour Môquet en postillonnant la playlist de leurs trouvailles de désoeuvrés infantiles, il y a que ce soir en te fouinant les entrailles vertueuses, je me suis arrêté sur un article du Monde.fr. Le titre seul est un poème d'amour à la sécurité :
Un projet de loi autoriserait Obama(on ne dit plus, cher Barak ?) à couper des pans entiers d'internet. A la lecture de l'article on se dit qu'il eut mieux valut ne pas apprendre à lire. Et à écrire encore moins car autant de jean-foutre dans les couloirs reliant la grande distribution et le pouvoir d'interner me font penser qu'ignorant je serai mieux en ce moment à me branler la gidouille à double douilles contre un pylône à haute tension que de continuer à éplucher le mode d'emplois offert à tout hypocrite qui se respecte.
- Tu as raison ce petit vin, une fois décanté...
" La Liberté sera pour eux un concept si abstrait, si loin de leur capacité à le concevoir, qu'ils vivront dans la frustration la plus bestiale."