Naissance d'un nouveau jour

Publié le 11 septembre 2007 par Laura Dove

L'air frais de l'extérieur et la vue du paysage illuminé par la lune -- qui s'était dévoilée entre-temps -- m'aidèrent à oblitérer mon malaise. Comprenez que je ne désavouais pas mon choix d'être devenu vampire. Ni alors, ni aujourd'hui, je n'ai regretté ma décision. Mais en ce premier soir, ma raison et ma conscience peinaient à trouver un accord. Nonobstant mes années de fréquentation d'Antoine, je restais un homme du Moyen-Age, pour qui boire du sang humain constituait un péché mortel. Néanmoins, j'éprouvais une joie tout à fait sincère à l'idée de ne plus craindre la vieillesse ni la maladie, et une profonde reconnaissance pour mon mentor de m'avoir accordé l'immortalité. Je supposai qu'avec le temps, je parviendrais à m'accoutumer à mes meurtres pour ne plus y voir, ultimement, que l'indifférente expression de la nécessité. Je me trompais. Tuer n'est jamais devenu anodin.

Sur le chemin, un nouveau phénomène vint me distraire de l'image des trop nombreux cadavres exsangues de la nuit: mes viscères se rappelèrent désagréablement à mon souvenir et je dus m'isoler pour un besoin pressant. Mon corps de vampire s'adaptait à sa nouvelle condition, évacuant les résidus inutiles de la mortalité. A mon retour, mon professeur me prévint que je subirais des coliques pendant quelques jours avant que mes intestins n'atteignissent un repos définitif. Simple désagrément temporaire que j'oublierais vite par la suite, me rassura-t-il -- le risque de souffrir d'incontinence pendant la journée, cependant, m'humiliait déjà par avance malgré ses efforts pour en minimiser l'importance.

Le reste de la nuit s'écoula sans plus de surprises. Cette fois, je parvins à mémoriser le chemin conduisant à notre retraite, grâce à tous les détails que me révélait désormais ma vue de vampire et, certes, à un sens de l'observation décent. Nous philosophâmes sur ma transformation et l'avenir qui s'ouvrait à moi, puis commençâmes l'entraînement qui me permettrait, à terme, de maîtriser ma force. Lorsque les toutes premières lueurs de l'aube commencèrent à éclaircir les cieux, mon mentor souligna l'importance vitale d'éviter les rayons du soleil.

Il était temps de me coucher pour mon premier repos de vampire.