Ciel noir et pierres blanches, c’est ainsi que l’histoire le racontera.
Mais c’est entre nous, entre nos pierres et leur ciel, que se jouera le sort du monde, décalqué comme une vision d’aujourd’hui transmise de voix en voix jusqu’à la bataille finale.
Pierres blanches sur ciel noir, ne vois-tu pas déjà l’affrontement se dessiner en ombres chinoises sur le présent ?
Nous avons montés nos murs en prières solides, tout autour de nous, pour que chacun puisse choisir son camp. Mais regarde-toi, regarde-les tourner autour de leurs propres remparts, ignorants de l’avenir, inconscients de ce que nous laisserons derrière nous lorsqu’il ne sera plus temps d ‘élever encore la ville pour durer, lorsque nous ferons le compte du peu que nous avons conservé. Ils ne savent pas, ils ne savent rien. Ils passent sous les pierres blanches sans plus voir le ciel noir qui les surplombe, et ils oublient qu’eux-mêmes seront oubliés. Ils oublient qu’ils vont mourir.
Mais pas nos pierres, oh non, pas nos façades bâties avec tant d’obstination pour nous voiler le ciel obscurci et nous raconter l’histoire de notre propre survie en confidences silencieuses. Pas nos murs alignés génération après génération, défi blanc que seul le temps rendra victorieux, crachat au destin dont nous sommes tous les spectateurs. L’histoire le dira, tu sais, cet affrontement muet qui verra des civilisations entières s’engloutir dans leur ignorance. Et que restera-t-il, découpé sur le ciel noir ? Que restera-t-il comme prière à nos dieux absents ? Un peu de nous, en poussière de pierre, ici et là amassée et conservée, un peu de ce qui fut et qui n’est plus. Nous avons tant bâti, nous avons inventé tant de solides remparts pour survivre. Qu’a donc le ciel, de plus puissant que nous ? Pourquoi toute épopée doit-elle devenir un désastre avant d’être rapportée ?
J’ai choisi mon camp, dans la guerre immémoriale. Et toi, où es-tu ?