*premières paroles d’un célèbre mantra bouddhiste
Comme je suis d’une cruauté sans nom, je vous avais laissés tremblants ne sachant pas ce qu’il allait advenir du pauvre Monsieur O. Je ne suis pas folle au point de vous raconter sa mort sur un blog vous vous doutez donc bien que son cerveau n’a pas explosé et qu’aujourd’hui il est sain et sauf. Cela dit, le pauvre kiki était bien mal en point, et comme je le disais précédemment, l’heure était à la décision.
En faisant le choix de rester à Ledtar, nous nous exposions au mieux à une amélioration ou stabilisation de son état, au pire à une aggravation ce qui était fort risqué. En l’absence de téléphone, de voiture, d’un quelconque moyen de transport, la seule solution, s’il y avait complications était d’envoyer quelqu’un à cheval vers le téléphone le plus proche, pour appeler l’hélicoptère (et là accroche toi mon pote, si t’as pas pris une bonne mutuelle, le transfert vers un hôpital de Kathmandu coûte 12 000 dollars. Autant dire adieu à son PEL)
En faisant le choix de redescendre à Manang au plus vite, voir un médecin devenait possible et, l’altitude redevenant raisonnable, (3500 m) la condition de monsieur O. s’améliorerait plus rapidement. Mais faire le choix de redescendre, c’était aussi revenir en arrière, perdre deux jours de marche, et donc, vous comprenez où je veux en venir… faire une croix sur la conquête du Chulu west. Autant dire « Le choix de Sophie » comme dirait Rachel dans l’épisode 7 de la saison 4 de friends.
Entre fouler la neige d’un sommet de 6000 mètres et avoir un mari en bonne santé ? Que choisissez vous ? Non mais quelle question… C’est pas vraiment l’équivalent de « tu préfères une jambe de bois ou un bras en mousse ? » ou « tu préfère ton papa ou ta maman ? » Vers 17h, donc, la décision était prise : Re -descente, direction Manang. Pendant que notre guide envoyait un porteur pour prévenir le reste de l’équipe qu’on battait en retraite, Nous entamions la descente, monsieur O. emmitouflé dans 12 couches façon bonhomme Michelin qui aurait couché avec un oignon.
Une descente très pénible qui semble durer des heures. Pour la première fois de tout le séjour - j’ai mal à la tête … peut être parce que je suis stressée, ptêtre même bien que c’est pas empathie… bref c’est long et la nuit commence à tomber. On est même pas à mi-chemin. Une fois qu’il fait bien noir, pas le choix, on continue à la lampe frontale. J’ai dû marcher dans un nombre incalculable de bouses de yack mais peu importe, il faut aller vite, le pauvre monsieur O. est au bout du rouleau. Arrivés à Manang son calvaire continue, car tous les hôtels sont pleins. Damber finit par nous trouver une chambre, et Monsieur O. après avoir bu deux cuillérées de soupe, s’effondre sur son lit. Je le borde. Il s’endort. Moi aussi, mais je me réveille plusieurs fois dans la nuit… pour voir s’il respire… Oui je sais c’est bête.
Dimanche 12 avril : Manang - journée de repos
Le lendemain, après un longue nuit (réveil à 7h… autant dire ambiance grasse mat) Monsieur O. va mieux, son mal de crâne a disparu, l’envie de vomir aussi. Il est juste très fatigué. Soulagement. Journée un peu morose. On réalise qu’on ne fera pas le sommet, en tous cas pas cette fois ci. On est crevés par la journée de la veille, mais rassurés. Maintenant il s’agit de savoir s’il est envisageable de passer le Thorong pass (le plus haut col du monde, à 5400 m) qui se trouve à une altitude plus élevée que celle à la quelle Monsieur O. est tombé malade…Si ce n’est pas possible, c’est un peu la catastrophe. J’explique rapidement. Notre parcours est une boucle, comportant (à la base) un petit crochet pour faire le sommet. Si , éviter le crochet est possible, le fait de faire la boucle entière en revanche, nous oblige à passer par le Thorong Pass : il n’y a pas d’autre chemin. Si le médecin décrète que Monsieur n’est pas en état, il nous faudra faire marche arrière jusqu’au point de départ, ce qui serait, avouons le très chiant.
L’après midi, verdict du médecin : avec une prise de Diamox et deux bons jours de repos, le passage du col est envisageable. On a donc l’autorisation de tenter le coup, sachant que si un problème survient une fois au col, il faut faire passer le malade à dos de mulet (à ce moment là, je ne peux m’empêcher d’avoir un rictus moqueur en imaginant monsieur O sur une mule…)
Lundi 13 avril -encore du repos à Manang
Je vais faire court car je me rends compte qu’il ya encore un sacré paquet de trucs. On se repose. On dort, On visite un temple et on se fait bénir par un Lama -escroc (100 roupies qu’il faut payer, pour être béni !!!) qui vérifie si les billets qu’on lui tend ne son pas des faux. Instant pittoresque qui fait la joie de Monsieur O, personnification de l’athéisme. Avant de passer à la suite de mon récit, je ne peux pas zapper le moment des au revoir avec Gallu aka Terminator, ainsi que deux de nos porteurs, Marsinz et Kes Bahadur : ils étaient chargé du bon déroulement de l’expédition. Maintenant que le projet est avorté, ils repartent dans l’autre sens. Nous continuerons la route avec Jaya et Damber. Ils sont tout déçus et limite plus tristes que nous. «I’m very very sorry » nous dit Gallu, en ajoutant: « Next time, we go ». La soirée se termine quand même joyeusement après quelques parties de “tigres et moutons”
Mardi 14 avril et mercredi 15 avril - montée à Letdar puis jour de repos à Letdar
Je passerai rapidement également sur ces deux journées, puisque j’en ai déjà décrit le paysage précédemment. Monsieur est toujours un peu irrité « de devoir rester là à rien foutre » pendant les journées de repos. Aussi, passe-t-il son temps à bougonner, quand il ne dort pas. Je lui explique que c’est pour son bien et que s’il est pas content je lui colle la fessée. Je suis quand même triste pour lui: Ce voyage c’était son idée à lui, ce sommet c’était son rêve. C’est quand même trop injuste…
Photo: pendant les jours de repos à Letdar
Jeudi 16 avril Letdar- Thorong phedi
Aaaaah enfin du nouveau ! Ces quelques heures de marches et ces nouveaux paysages nous remettent du baume au cœur et nous collent la pêche. On arrive dans un nouveau lodge à l’heure du déjeuner. L’après midi, petite promenade pour repérer le début du trajet du lendemain : On va partie dans la nuit aux alentours de 3h, pour arriver au Thorong pass vers 8h, avant qu’il y ait trop de vent. On rencontre un couple de français, profs, qui ont tout plaqué pour faire le tour de l’Asie. La nana est prof de cuisine en SEGPA. Grâce à princesse Sosso, je réalise que les SEGPA sont capables d’exploits avec des couteaux de cuisine.Ca fait plaisir de rencontrer des gens de notre âge et de pouvoir partager un dîner de nouilles tout en parlant du saucisson, et du camembert dont on rêve tous depuis quelques jours…
Photo: La monté vers Thorong Phedi, la pause avec monsieur O. (Non je ne suis pas déguisée en braqueuse, j’ ai juste froid au nez)
Vendredi 17 avril - Thorong Phedi -Muktinath via le Thorong Pass aka le plus haut col du monde.
Réveil programmé à 3h. Réveil effectif à 3h moins le quart à cause d’un brochette de rosbeef qui on décidé de squatter devant les chiottes en braillant à tue -tête . On petit déjeune rapidement sans trop se cailler les miches : on a sorti la grosse artillerie cette fois : polaire, sous polaire, veste windstopper, et the doudoune de la mort qui tue. On part quasiment les derniers (bouh j’aime pas ça) sur le coup de quatre heure. Ca monte bien raide comme il faut. Au dessus de nous, dans le noir on aperçoit juste les petites guirlandes de lumière formées parles lampes frontales des autre groupe qui avancent à la queue leu leu sur le petit chemin étroit. Il fait vraiment très froid et je commets l’erreur fatale de vouloir réajuster mes moufle : Paf ! une onglée (vous savez quand vous avez les mains paralysées par le froid, les doigts qui vous brûlent… le bonheur) Sur les dernières heures de marche l’oxygène vient vraiment à manquer : à chaque fois qu’on prend une grande inspiration ça brûle, heureusement, la vue du soleil qui se lève sur les montagne est grandiose et fait oublier tout les petits bobos. Monsieur O se porte comme un charme, aucun signe de fatigue à l’horizon. Il va pouvoir echapper à l’option mulet…
Photo: à l’arrivée au Thorong Pass -avec les français, je ne me cache pas, je l’ai mise juste pour que vous puissiez admirer mes moufle de géant.
Tout se profile parfaitement et vers huit heures nous apercevons les petits drapeaux multicolores népalais qui semble nous crier « you did dit » ca y est on y est arrivé !!! Notre appareil photo est tombé en panne mais les français nous photographient avec Jaya et Damber et nous promettent de nous envoyer le cliché de la victoire par mail. Il souffle un vent pas possible, il va falloir se dépêcher de redescendre… meuh. J’aime pas les descentes : mes genoux en prennent plein la gueule à chaque fois… Celle-ci et longue, et une fois le neige passée, c’est pas une partie de plaisir…la pente est raide et caillouteuse, j’en chie un peu avec les godasses de la mort. Quelques heures plus tard au fond d’une vallée nous voyons apparaître Muktinath, comme un mirage. Le paysage a encore changé, normal, en passant le col nous avons quitté la région de Manang, pour entrer dans le Mustang.
Photo: le Thorong Pass, point culminant de notre voyage, 5416 m
Muktinath est une ville sainte, un haut lieu de pèlerinage, très connue pour son temple immense qui renferme dans son aenceinte des lieu de culte à la fois bouddhiste et hindouistes. Beaucoup d’Indiens viennent le visiter chaque jour. Nous profitons del’après midi (après une longue sieste mérité) pour nous y rendre. On peut y voir les célèbres 108 robinets (l’eau qui en coule est bien sûr sacrée) ainsi que des Saddous. (les mec qui font rien que de fumer de la beu tout la journée, assis sous un arbre)
Photo : les 108 robinets sacrés
Samedi 18 avril -Muktinath - Jomsom
Maintenant que le col a été traversé, il n’y aura plus de montée… nous allons uniquement descendre de plusieurs milliers de mètre -pour mon plus grand bonheur- Le trajet que nous effectuons pour rejoindre la ville de Jomsom est plutôt étonnant : On dirait le Texas tout à coup ! C’est désertique, quelques plantes grasses, beaucoup de caillasse. Sur la fin le vent se met à souffler avec une force incroyable dans la vallée. Je suis à la limite de m’envoler dans les airs, et Jaya, avec son gros chargement est un peu en galère. Mais il trace à fond : pour lui c’est le dernier jour de travail ! Arrivée à Jomsom, qui est une ville assez moche, (comparée a toutes celles qui nous avons vue)Dernière soirée avec Jaya, qui va nous laisser nos bagages et prendre un bus pour rejoindre Kathmandu, pendant que nous prendrons l’avion jusqu’à Pokhara, pour visiter. Comme pour Marsinz, Kes bahadur et Gallu, nous lui remettons une enveloppe avec des petits cadeaux, un peu d’argent (mais une somme conséquente quand on connait le salaire moyen népalais- ce qui nous paraissait normal, vu le travail accompli, toujours avec sourire et gentillesse) et un petite carte souvenir. Et voilà nous ne sommes plus que trois !
photo 1: La grande vallée à traverser pour arriver à Jomsom
photo 2 : l’ hôtel “plaza” -juste parce que ça me fait rire.
Dimanche 19 avril Jomsom- Pokhara. Aka le jour ou nous avons vu la mort de près.
ON le savait que ce jour devait arriver. On voulait pas trop y penser, mais on a bien du se rendre à l’évidence ce matin là. On allait voyager jusqu’à Pokhara là dedans :
Donc déjà, a la base on partait pas hyper rassurés. Monsieur arrêtait pas de me répéter (d’une voix pleine de doute) « N’aies pas peur mon cœur, ça va être fun. » Déjà à l’ aéroport, quand tu passes le « security check » un bonne femme te tâte vaguement, te demande si tu as un couteau sur toi et te laisse passer. Et là tu te dis « si j’étais un taliban, détourner un avion népalais ça serait trop fastoche »
Nous entrons dans l’avion qui vrombit déjà d’une manière assez inquiétante. A l’intérieur, deux rangées de 5 sièges. Ca y est on décolle et oulaaaah une vrille façon space mountain !!! dis donc c’est sportif ! (dis je en devenant verte) et puis c’est là que ça se met à devenir flippant : on traverse une zone de turbulence. Déjà dans un Airbus 340 c’est pas rassurant alors je vous laisse imaginer l’effet dans un avion en boîte de conserve. Je me dis ça y est. On y est. Il faut que je pense à tout ceux que j’aime…Le népalais assis devant moi fait sa prière en se cramponnant à sa chaise comme un taré, monsieur O est livide, mais il filme pour s’occuper l’esprit. Je me retourne et demande en rigolant à notre guide « c’est toujours comme ça, hein Damber ? » et lui de me répondre « heu,non, ça première fois ! » Génial. Quand l’avion se pose, 20 minutes plus tard (heureusement ce cauchemar n’a duré que 20 minutes) nous sortons de l’appareil et le deux brésiliens qui étaient assis devant nous viennent nous serrer la main : It’s good to be alive !
Pokhara, ressemble à Kathmandu, mais en plus verdoyant et un peu moins bordélique. Il y règne une chaleur étouffante… Nous arrivons à l’hôtel, oui car cette fois on peut vraiment appeler ça un hôtel. On nous montre notre chambre et là j’ai presque un orgasme en voyant la salle de bain avec un robinet rouge et un robinet bleu. Je vais pouvoir me laver à l’eau chaude et au savon ! Je vais pouvoir me laver les cheveux qui sont en train de virer carton.
Une fois tout beaux, tout propres, nous allons nous ballader dans la ville et faire de la barque sur le grand lac. Au programme de la soirée : restaurant avec Damber ! Il nous emmène dans un petit endroit bien sympathique ou on peu déguster une pizza ma foi pas trop dégueu quoique pas très orthodoxe de composition et assister à un spectacle de chants et danses traditionnelles. Nous goutons à l’occasion la bière locale (baptisée « everest » tout simplement) une bière très légère mais qui suffit à mettre Damber d’humeur plus que joyeuse…
photo: Le lac de Pokhara
Lundi 20 avril : retour à Kathmandu
Je passerai rapidement sur cette journée puisqu’il s’agit à nouveau d’un trajet en bus vers Kathmandu, aussi riche en péripéties du même genre que lors du trajet de l’ aller. Arrivés à Kathmandu dans l’après midi nous allons rendre le matériel de location à la boutique et rendre une petite visite au staff de l’agence. On en profite pour leur laisser quelques affaires à nous (des polaires, quelques bouqins et magazines) en plus des huits kilos de vêtement apportés à l’aller pour les enfants des villages. C’est le moment de dire au revoir à notre petit Damber, qui a été si gentil, prévenant et attentif tout au long de ce périple. Un deuxième aurevoir aussi à Gallu, qui est repassé à l’agence pour nous faire un coucou. Les porteurs eux, sont déjà sour les routes d’un autre trekk.
Mardi 21 et mercredi 22 : journées libres dans Kathmandu
Entre la course aux petits souvenirs pour la famille et les amis et les bagages à refaire nous avons à peine eu le temps de faire quelques dernières ballades dans les rues bruyantes de la capitale. Il faut trouver un cadeau pour la petite sœur, un jeu de tigre et moutons en souvenir, des moulins à prières, une pipe en bois pour mon petit frère (oui ça lui arrive à cette espèce de dandy de fumer la pipe) un biiiiiiiip pour ma copine sandra aka la choune, un biiiiiiiiip pour ma copine camille (j’ai pas encore eu le temps de leur donner, d’où le bip) … On profite des derniers moments dans ce pays et on se dit déjà que ça va nous faire tout bizarre de retrouver notre maison et notre petit quartier…
Photo: l’enfer du shopping à kathmandu, yen a partout, tu veux tout acheter… (je parle pour moi… pas pour l’autre bizarre)
Jeudi 23 avril retour à Paname
Dans l’ avion, monsieur O. trépigne on a le cinéma dans les deux avions, voilà qui va faire passer le temps ! Et effectivement le voyage passe très vite et en un clin d’oeil -ou presque nous voilà en train d’attérir sur Charles de Gaulle (l’image est assez drôle si on se le figure) A l’arrêt de l’ appareil tout le monde se rue vers le sortie de l’avion en se bousculant et en râlant, alors que BANDE DE BOUFFONS ça ne sert à rien de se presser vous allez vous retrouver à attendre vos bagages pendant une heure comme des cons. Dans le couloir de l’ aéroport, le français devant nous a un papier sale collé à sa chaussure. Il s’en rend compte, le retire et, au lieu de le jeter dans la poubelle à sa gauche, le re-jette par terre, histoire de faire chier. Ahhhh la France. Les Français. Pas de doute on est bien de retour à la maison.
C’ est sur ces mots que s’achève donc le récit de notre périple-aventure-voyage de noce qui tue. Que dire à part un truc bien niais du genre “on oubliera jamais ce voyage inoubliable” Oui. n’empêche, c’est vrai.
Ah oui j’oubliais… je vous l’avais promis : attention âmes sensibles préparez vous au choc…
Photo 1 : The doudoune la plus moche of the galaxy. E t là encore grâce à la lumière on dirait qu’elle est orange, mais en vrai, elle EXACTEMENT couleur caca.