Magazine Journal intime

En Voiture Simone, Je Conduis, Tu Klaxonnes, FastShop Pour IPhone.

Publié le 05 mai 2009 par Mélina Loupia
Du lundi, dorénavant, je retiendrai 2 choses.

Ne pas aller faire ses courses, tous les rayons sont vides, il reste que les trucs super chers, que les mômes adorent et qui font un gros caprice ensuite dès lors qu'ils auront tout dévoré en 5 minutes. Et après, avancer qu'il s'agit de l'organisation de livraison des centrales alimentaires, suivie de celle de l'organigramme des employés des magasins, c'est courir à la catastrophe domestique, " on s'en tape nous, on veut du pain de mie Harrys sans croûte jusqu'à nos 18 ans. Au moins."

Ne jamais aller chercher son courrier quand on y a pas été non plus le vendredi et le samedi d'avant.
Parce que recevoir sa déclaration de revenus pré-remplie et truffée d'erreurs avec les cantines et les bus du 3ème trimestre en même temps, ça fait chaud pour un lundi matin. Surtout quand il a plu tout le week-end, et que forcément, l'étanchéité de la boite aux lettres est fortement remise en cause, au point qu'on ne sait plus vraiment si on doit payer 99.63€ de transport scolaire ou 996.3€. "Ah ils leur ont mis des sièges baquet Recaro avec des jantes en diamant?"

Mais pour l'heure, je balance la liasse molle sur la table, en espérant que le chat s'y vautre dessus pour sécher un peu et je rassemble mon kit de ménagère de moins de 50 ans:

-sacs réutilisables pour une fois emboîtés les uns dans les autres.
-pièce de 1€ pour le caddie, le jeton a encore une fois été tester les abysses de mon sac, desquelles il n'est visiblement pas remonté, pas très fort en apnée, un jeton.
-le dit sac, vidé comme un lapin, la tête en bas, pour vérifier si tous les moyens de paiement et les cartes de fidélité, ainsi que la pièce d'identité magique y sont.
-la bouteille de gaz que je pensais vide et donc à changer, et dont je me suis finalement aperçue, une fois jetée au fond du coffre de la voiture, et m'être fusillé le dos, qu'elle était pleine.
-Simone, au cas où Wikio m'appelle.

Simone.
Ah.... SIMONE.
Depuis que, au terme de 7.83€ d'âpres négociations avec Madame, Mademoiselle et Monsieur Orange, Simone est entrée dans ma vie, à raison de quelques dizaines d'€ par mois, je me demande bien comment je pouvais faire avant.

Surtout les courses. Avec FastShop, l'application must-have pour toutes les ménagères qui vont faire leurs courses le lundi et qui oublient leurs têtes.

En Voiture Simone, Je Conduis, Tu Klaxonnes, FastShop Pour IPhone.

FAstShop, c'est l'enveloppe de la facture EDF déchirée, qu'on laisse bien évidemment sur la table, avec une liste de courses longue comme les bras de Chewbacca, et qui, au retour, fait hurler. "PUTAIN j'ai ENCORE oublié la liste et les 3/4 des trucs écrits dessus, BORDEL mais forcément, si, dans cette baraque, on m'aidait un tant soit peu, forcément, j'aurais moins de trucs à penser et LOGIQUEMENT, cette saloperie de liste à la Bernard-Mon-Oncle, je l'oublierais pas. Quoi y a plus de PQ? Faites avec le SOPALIN. Je l'ai oublié le SOPALIN? PARDON? Ah mais je l'ai pas mis dans la liste le SOPALIN, vu que je pensais ne pas en avoir besoin, étant donné que j'avais mis PQ sur la liste..."

Et FastShop, ce fâcheux épisode domestique, il te le fait oublier. Tu gagnes du temps.
Tu tapotes ce dont tu as besoin, en secret au fond du lit, de façon à ce que personne ne vienne rajouter sa liste perso, et hop.

Une fois arrivée sur le parking, décontrastée comme Denise, je vole sur la chaussée avec mon caddie, tout léger.
Et immédiatement, je dégaine Simone.

Sous le regard médusé d'une mamie qui se demande quelle chaîne de télé je peux bien regarder, du jeune à capuche qui se demande dans quel rayon il va pouvoir choper l'angle mort de la vidéosurveillance pour me le barboter, et du chef de rayon qui n'a qu'une envie, choper l'angle mort pour me secouer vite fait.

En position sprint du cycliste, les deux mains collées sur la barre du caddie, enserrant Simone, je biffe de l'index chaque article listé et jeté dans le chariot.

Le geste coordonné, je connais mon itinéraire, le frais à l'entrée, l'hygiène au milieu, le sec à gauche et les conneries en caisse. Dès que je cible de l'oeil l'article voulu, je lâche Simone de la main droite, j'attrape le produit avec la précision d'un vautour dans le foie du buffle encore vivant et je balance. La main à nouveau libre vient préserver Simone de toute attaque sournoise potentielle.

Sauf qu'à force de répéter la chorégraphie pourtant éprouvée, le relâchement et l'excès de confiance font qu'on finit par omettre qu'on est pas seul au monde.
En l'occurrence, des allées, dégagées, certes, mais soutenues par d'énormes piliers en béton armé, lesquelles garantissent la solidité et la stabilité des rayons, et surtout, des têtes de gondole.

Et lorsque comme moi, on a la tête dans le guidon, l'horaire qui avance dangereusement vers le retard et les embouteillages à la sortie, les dents du fond qui baignent des 4 cafés matinaux, et une sainte horreur de la foule, les courses, on a tendance à le faire en délit de grande vitesse.
Si l'on ajoute le nouveau paramètre qui est de ne pas quitter Simone des yeux, au bout d'un moment, le pilier en béton armé, on se le mange.

Cru.
Sans assaisonnement.
Du recul, mais préférant la vie de mon iPhone à la mienne, je laisse le caddie dériver à la rencontre de la tête de gondole qui, comme de par hasard, mettait en promo le SOPALIN.
Au bas mot 100 packs de 3 rouleaux empilés comme un Jenga. C'est la saison des stagiaires, auxquels on confie la lourde tâche de faire du facing. "Allez, vas donc me faire une TG de Sopalin qu'on rigole."

Je ne me plains pas, il m'en fallait justement, du Sopalin.

Pas forcément les 10 packs qui ont atterri dans mon chariot, ni les 90 qui sont tombés à côté, leur blanc immaculé faisant ressortir le pourpre de mes joues.


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