L'argent-temps

Publié le 22 avril 2009 par Ekilio

Je repensais aux propos remarquables que j'ai tenus ici-même il y a quelques temps, et j'ai cherché à aller un peu plus loin dans ma réflexion et dans mon questionnement ; et par ce biais, j'en suis venu à un point : qu'est-ce que l'argent ?

Au final, c'est autour de cette question que tournent toutes les polémiques parlant du salaire des chefs d'entreprises, de nos dirigeants ou de toute autre personnes ; c'est aussi de cette question que s'articulent une bonne partie de nos lois. Qu'est-ce que l'argent ? Que représente-t-il ? Si j'ai une pièce d'un euro dans la main, est-ce que je suis en mesure de faire beaucoup de choses, ou rien ?

La réponse qu'on aurait bien sûr immédiatement tendance à choisir est "rien". Et pourtant, si nous devions lister toutes les choses possibles avec un euro... Prendre un café (parfois), acheter des bonbons, une viennoiserie, jouer à pile ou face, faire plaisir à un mendiant dans la rue, acheter le journal, faire des jeux de lumière sur les murs... Bref, beaucoup de choses. Et en même temps très peu.

Cet euro représente environ 1/1000eme de mon salaire. En d'autres termes, en travaillant un mois, je gagne 1000 euros ; sachant que je travaille (en gros) 35 heures par semaines et qu'il y a (en gros) 4 semaines par mois, soit 140 heures environ par mois ; un euro représente donc entre 8 et 9 minutes de mon temps de travail. Parallèlement, un chef d'entreprise gagne, dans une grosse entreprise, 135 800 euros par mois. Un euro représente donc à peine plus de 3 secondes de son temps à lui. Partant de là, quelle est la vraie valeur d'un euro ? Huit minutes ? Trois secondes ?

L'argent, dans sa conception, n'a qu'un seul but à mes yeux : unifier le prix de toutes les choses qui peuvent s'acheter et se vendre. Au lieu d'échanger un poulet contre deux pains, on échange un poulet contre deux pièces et un pain contre une pièce. Il y a donc derrière cette idée une valeur "unitaire" : il reste dans la logique du troc qui l'a précédé, et toute chose garde sa valeur propre ; le rapport entre un poulet et un pain est toujours le même. Remontons un peu en arrière : comment déterminer si un objet vaux une, deux, trois, milles pièces ? Qu'est-ce qui fait la valeur intrinsèque d'un objet ? Reprenons notre pain : il coute le prix de la farine, du beurre, de l'eau, de l'électricité pour le four ; en plus de ça, il coute aussi ce que l'état prends en impôts ; et enfin, il coute aussi du temps à notre boulanger. La farine coute du blé et du temps pour la moudre ; le blé coute du temps pour le faire pousser et le récolter. Au final, chaque chose peut être ramenée à un rapport de temps : le temps qu'il faut pour faire pousser le blé, le temps qu'il faut pour faire de ce blé de la farine, le temps qu'il faut pour faire le pain et le vendre.

Si nous additionnons tous ces temps, nous pourrions trouver un prix. Un prix en temps : voila, ce pain a couté exactement 8,5 minutes à produire, tout mis bout à bout (n'oubliez pas qu'on produit plusieurs pains en même temps, et idem pour le blé et la farine ! Il faut donc diviser !) ; et par conséquent, pour l'acheter, cela vous coutera 8,5 minutes. En articulant ainsi notre monnaie, en la formulant ainsi, nous pouvons trouver facilement la valeur de chaque chose ; bien sûr, il faudrait pondérer ce temps par le temps mis pour apprendre à faire chaque chose : ainsi, les huit ans qu'il faut pour étudier la médecine devraient être ajoutés aux factures des médecins ; l'experience ajoutée aux salaires, logiquement, puisque c'est du temps en plus ; et ainsi de suite.

La monnaie redeviendrais alors réellement unifiée ; et dans le même temps, il y aurait une vraie récompense au fait de travailler plus (le crédit-temps gagné serait d'autant plus grand), et l'argent aurait un vrai sens qui serait insensible aux fluctuations de la bourse !

Bien sûr, ce n'est qu'une idée sommaire... Mais elle me semble amusante. Non ?