Amies

Voyages

Direction Porto

Depuis l’enfance, je rêve que l’un de mes amours ou l’une de mes passagères passions, m’offre un voyage surprise. Trente-cinq ans, de multiples aventures et cinq couples plus tard, aucun amour -hétéro ou pas- ne m’a jamais organisé de voyage. Même les banales vacances c’est toujours moi qui les ai proposées et gérées. Mon seul, mon plus beau souvenir de week-end “surprise”, je le dois à mon amie Marine en 1989. Un vendredi soir, lorsque j’étais jeune divorcée, je geignais au téléphone lui expliquant pour la millième fois mon envie qu’une personne me surprenne en m’emmenant visiter Venise, Florence ou les musées Viennois -j’étais et suis encore fan de Klimt et Schiele - en y ajoutant que naturellement cela n’arriverai jamais blabli, blabla. En ce temps là, je vivais sans animaux. Un amant attentionné aurait facilement pu le réaliser ce fantasme. Mais rien… Je ne suis pas le genre de femme amoureusement ou sexuellement attirée par des personnes sachant apporter du rêve. Au bout de deux heures de conversation par téléphone -à fil à l’époque- mon amie Marine me dit:

-C’est à combien de kilomètres Vienne?

-Euh… Sais pas… Comme Paris je suppose…

-Prépare tes affaires! Je passe te chercher! On part à Vienne.

Trois-quart d’heure plus tard, nous sommes parties en voiture avec l’inconscience de la vingtaine, sans même jeter un oeil sur une carte qui nous aurait appris que Vienne c’est loin, très, loin, bien plus loin que Paris. Ce détail rendit notre voyage un peu difficile, mais cette épopée de trois jours reste l’un de mes plus beaux souvenirs d’amitié. De folie amicale.

Ce rêve, qu’une personne m’emmène subitement en voyage, j’en ai souvent parlé à Vicky. La dernière fois mardi soir, au téléphone -sans fil de nos jours- mes histoires d’amitié étant toujours ponctuées de longues conversations téléphoniques -avec ou sans fil-. J’entrecoupais mes jérémiades sur mes finances dignes d’un conte ou de la vie d’Edgar Poe, par de brèves lamentations de ne pouvoir envisager un séjour hors de Suisse ni cette année ni… je ne sais quand. Pas dans un futur proche à présent que la maison de ma mère, qui vit en Espagne, m’est interdite par son conjoint. J’ai enchaîné sur mon incapacité, dans mes jeunes années, à choisir un amour stable ou de passage capable de me surprendre avec un voyage à l’étranger, raison pour laquelle sans doute, bien que sache qu’il ne faut jamais dire “fontaine je ne boirais pas de ton eau”, j’ai décidé de définitivement me passer de cette excroissance plus souvent douloureuse que merveilleuse. Le lendemain, comme presque tous les soirs Vicky me téléphonait mais, cette fois, plus tôt qu’à l’habitude. Sa voix partait dans les aiguës, surexcitée:

-Bon alors, tu veux aller où? Rome, Bastia, Las Palmas, Ibiza, Alicante, Porto, Barcelone, Gran Canaria, Les Asturies, Lisbonne, Nice, Bordeaux, Dubrovnik, Madrid…

-Hein? Euh… Ben je t’ai déjà dit: New-York!

-Non! Sérieusement! En juin, ils cassent les prix sur la compagnie aérienne orange.

-T’es complètement folle! Tu vas pas m’offrir un voyage?! (Faut dire que je connais approximativement l’état des chiffres du “mirobolant” compte en banque de Vicky!)

-Tssssssssss! T’as rien à dire! On ne vit qu’une fois! Alors on part!

-Ben… je sais pas moi… où tu veux.

-Ils font des offres pour Berlin, Budapest, Prague, Vienne et le nord de l’Europe mais j’ai envie d’aller au sud! Alors vas-y! Choisis une destination au sud!

-Euh… t’as dit quelles villes?

Après une courte discussion, nous avons décidé d’éviter les lieux qu’elle ou moi connaissons déjà, ce qui a beaucoup restreint notre choix qui finalement s’est arrêté sur Porto. Donc la première semaine de juin NOUS PARTONS quelques jours en VACANCES, dans l’une des plus belles villes portuaires d’Europe! Youpiiiiiiiiiiiiiii! Dunia y’en à être contente!

T’es folle Vicky de casser ta tire-lire de cette façon! T’es totalement mais positivement cinglée! Contudo agradeço-o mil vezes. Comme je suis incapable d’apprécier les personnes équilibrées ou raisonnables, je t’adore sûrement pour cette folie qui t’anime! Petit baume pour mon égo: je suis moins nulle pour choisir mes amies que mes amant(e)s ou mes amours*.

*Je me réfère ici à leur unique capacité de m’organiser un séjour de rêves. J’ai heureusement quand même eu de bons moments avec mes ex.

Le fleuve Douro à Porto.

Embarcation typique.

Pour nous mettre dans l’ambiance, un fado interprété par Mariza.