(Beaucoup de textes à l'ambiance "personnelle" en ce moment, promis je reviends bientôt sur des thèmes plus
légers. Les longs week-end sont toujours propices à l'introspection)
La
reminescence est sans doute l'un des plus douloureux moments de l'existence. Ce que l'on croit enfoui, ce que l'on pense terminé à jamais, vient parfois vous heurter de plein fouet, des années
après. Je fais connaissance avec la haine, nouvelle compagne de mes nuits, que j'ignorais assez superbement jusque là.
Moi la tendre, moi la naïve, aujourd'hui un nouveau sentiment accompagne mes pas et il n'est ni beau à voir, ni
agréable à sentir. Laid, petit et difforme, il se loge pourtant dans mes tripes avec entrain et brûle de toute sa violence.
Pourquoi maintenant ? Peut-être justement parce que cette fois-ci tout est fini. Le deuil est pourtant fait depuis
des années mais cela semble plus fort que moi, indomptable et puissant. Chaque nuit, cela hante mes rêves. Je me sens alors submergée par les vagues de cette haine qui me donnent des idées
sombres, alors que le combat est fini depuis longtemps déjà.
Je rêve de massacre de mes propres mains, je rêve de destruction d'existence, la sienne, la leur et tout ce qui va
avec. Chaque jour je constate malgré moi les dégâts occasionnées sur ma propre vie. Je lui en veut de se balader chaque jour libre, le nez au vent, sans doute heureux.
Les victimes restent des victimes, tant que leur bourreau survit et parfois même au-delà. C'est
injuste.
L'autre soir, surprise, c'est presque une bouffée de tendresse que m'évoquait son souvenir. Et puis le souvenir
d'antan a vite été remplacé par le monstre d'aujourd'hui.
Il est mort à présent et lui offrir encore cette victoire en remuant le passé et en sentant mes tripes se nouer,
c'est déjà trop. Il ne mérite pas, il n'a jamais mérité d'ailleurs et j'en pleurerais de rage et de désespoir d'en être toujours dans ce schéma là.
Il y a quelque chose à comprendre, il y a quelque chose à dépasser et là haine ne peut m'aider.
Pourtant chaque nuit je rêve de massacre, de destruction, de vérité révélée, de cris et de soulagement,
d'apaisement et de passé effacé.
Je voudrai l'insulter alors qu'à l'époque je suis restée muette, je voudrai le frapper, alors que je suis restée
immobile. Je voudrai lui cracher au visage, le maudire, lui souhaiter qu'il souffre autant que ce qu'il m'a fait subir et qu'il crève si ce n'était déjà fait
Ce sont les années perdues qui m'écoeurent, c'est le temps qu'on ne rattrape jamais qui me mine. Et je me déteste
de perdre encore de précieuses minutes à penser à tout cela, même à écrire dessus.
Pourtant la lumière n'est pas loin et j'ai traversé une bonne partie du chemin.
Aucune énergie n'est bonne à mettre dans la haine, aucun bien ne peut en ressortir, alors je veux croire que
demain, j'arriverai à oublier, à avancer.
Image : Le Cri, E. Munch