J'ai eu quelques échos (par la radio) du Forum qui s'est tenu samedi 9 mai ŕ la MC2 de Grenoble sur le thème "Réinventer la démocratie".
Des interventions de Pierre Rosanvallon, j'ai retenu entre autres cette idée qu'au fond, trčs vite, les citoyens ne se sont plus contentés de la démocratie électorale. Déjŕ en 1789, en 1848... la demande des citoyens était que la démocratie soit permanente. Aujourd'hui il nous faudrait ŕ nouveau "faire entrer la démocratie en laboratoire".
Il faut appeler au développement de l'activité citoyenne. Il y a une demande formidable de compréhension. Comprendre le monde c'est commencer ŕ se le réapproprier. La démocratie peut ętre définie (définition large) comme l'ensemble des procédures qui permettent de maîtriser/se réapproprier le monde. D'oů le besoin accru de production d'idées neuves.
Le risque le plus grand que je perçois dans la crise est que, celle-ci dépassée - elle le sera nécessairement un jour, proche ou plus lointain - tout recommence comme avant. Pas d'idées neuves. Pas de pratiques neuves.
Le risque est bien grand, quand on voit que le plan de sauvetage des banques ne semble gučre avoir d'autre finalité que de les remettre sur pied... comme avant, - sans qu'aucune réflexion sérieuse soit menée sur les garde-fous (au sens propre !) ŕ apporter au systčme, et d'abord comment reconnecter l'ingénierie financičre ŕ l'économie réelle.
Le risque est bien grand, quand on voit que les médias s'intéressent, mčnent enquętes sur enquętes, sur les "changements d'habitudes" des Français face ŕ la crise, - mais quid des changements - durables - de comportements, qui persisteront aprčs la crise ?
Patrice Viveret, présent au męme colloque, a souligné de son côté ŕ quel point la crise est le résultat d'une "démesure" (comme le découplage entre les transactions financičres et l'économie réelle). La démocratie doit arręter de laisser faire (le mouvement de dérégulation des trente derničres années) et travailler ŕ réouvrir l'imaginaire.
Réouvrir l'imaginaire...
Et si cela commençait, me dis-je, par nous réinterroger sur les mots, avec lesquels on nomme les choses ? Au moment des grandes découvertes, le Portugal appelle d'abord la pointe sud de l'Afrique le Cap des Tempętes. Il comprend vite qu'il faut changer. Le roi Manuel Ier, dit le Fortuné, impose le Cap de Bonne-Espérance. Les bateaux n'ont pas fait naufrage moins souvent, mais la route de l'Inde était ouverte et tordus les destins du monde.
"A quoi bon des počtes pour un temps de détresse ?" (Höderlin)
A réouvrir l'imaginaire pour passer le Cap de Bonne-Espérance !