L'art de se faire des films

Publié le 12 mai 2009 par Anaïs Valente

J'ai lu sur le blog chabadabada que les filles étaient championnes dans l'art de se faire des films au niveau des mecs, parfois même avant de les avoir rencontrés...

Etonnamment (jouez les étonnés, par pitié), cette constatation m'a rappelé un tas, mais un tas vraiment énooooooooooooorme, genre terril de Charlerwè, de souvenirs.

Prenons-en un au hasard.  Vraiment au hasard.

Moi, sur la page orange, en train de faire le tri dans mes milliards de messages.  Soudain, l'un d'eux sort du lot.  Un message sans faute.  Drôle.  Une introduction dont j'ai oublié les tenants et aboutissants, mais bien loin des sempiternels « bonjour, tu fais kwa dans la vie, tu veux des enfants, tu cherches quoi ici ? » (je cherche un carnet à spirale pour écrire mes chroniques, c'est pas ici que ça s'achète ?)

Bref on discute.  Beaucoup.  Longtemps.  On passe sur MSN, ce qui est déjà l'épreuve ultime, car entre les messages genre mails et le tchat, y'a une grosse nuance qui peut briser tout le charme.  Mais le charme n'est pas brisé.  Que nenni.  Mieux.  Il a mis sa photo, et je le trouve craquant.  Alors je mets ma photo, et il ne s'enfuit pas en courant, ce qui relève du miracle, je vous prie de le croire.

On discute une bonne partie de la nuit et comme ça, d'un coup d'un seul, il m'invite au resto le lendemain soir.  Je réfléchis deux secondes.  J'interroge mon estomac qui pour le moment hésite entre ulcère et indigestions quotidiennes, je lui intime l'ordre de me laisser quelques heures de répit, on conclut un pacte de non-agression. 

Et j'accepte l'invitation.  Demain.  19 heures.  Petit resto italien du coin.  Nan, je vous dirai pas le nom, des fois que vous en feriez votre QG.  Le petit italien du coin, c'est MON QG, est-ce bien clair ?

Il est quatre heures du mat, on se dit à demain, ou plutôt à tout à l'heure. 

Et je file faire de beaux rêves sous mon édredon bien rembourré qui sent si bon mon nouvel adoucissant, ou adoucisseur, jamais su comment skon disait au juste.

Et c'est là que le film commence.

Passque j'ai rendez-vous demain, enfin tout à l'heure, avec un presque inconnu dont j'ai juste vu la photo mais avec qui le courant passe tellement bien qu'il est clair et net comme clarinette que c'est l'homme de ma vie et même de l'éternité qui suivra.

Non contente d'imaginer qu'on va se plaire s'épouser s'aimer pour les siècles des siècles amen, j'en arrive même à imaginer toute la soirée, dialogues à l'appui.  Et surtout la fin de soirée, le moment oùsqu'il me ramène chez moi pour un dernier verre, me regarde de ses grands yeux bruns (ou bleus, ça va aussi, même gris ou verts, chuis pas raciste), se penche vers moi et m'embrasse voluptueusement.

Dans mon scénario, tout est absolument parfait.

Alors j'imagine la suite.  Mon état d'amour incommensurable, les copines à qui je raconte que je suis (enfin) raide dingue d'amour de l'homme idéalement idéal, puis ma mère, puis le mariage, et pourquoi pas un enfant même si ça se discute hein, faut pas mettre la charue avant les bœufs, c'est pas mon genre, vous le savez.

Et puis il est sept heures du mat et j'ai pas encore dormi.  J'ai que fantasmé.

Toute la journée, je fantasme encore.

Puis il est 19 heures, et là y'a plusieurs possibilités :

- il ne vient pas, cet enfoiré chronique, je le savais qu'il était trop poli pour être honnête

- il vient et c'est la catastrophe, mes plans sur la comète s'écroulent comme un château de cartes de belle au bois dormant

- il vient et c'est fabuleusement fabuleux, comme dans mon fantasme, le bonheur nirvanesque, l'amour éternel et blablabli et blablabla

Devinez quelle possibilité ne s'est jamais, jamais, jamais réalisée à ce jour, hein, devinez donc une fois...

Vie cruelle.  Monde cruel.