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Une autre illusion européenne : la défense commune

Publié le 03 juin 2009 par Micheljanva
Jean-Dominique Merchet, journaliste spécialiste des questions de Défense, publie aujourd'hui son livre 'Défense européenne, la grande illusion". Il le présente :
"La défense européenne est une illusion. Elle ne verra pas le jour et c'est tant mieux, car c'est une illusion dangereuse (...)
C'est que la défense n'est pas une politique comme les autres – on ne la range pas dans le catalogue des politiques sectorielles aux côtés de celles de l'agriculture, de la santé publique, de l'aide au développement ou des transports (...) Il y est question de vie et de mort, d'intérêts vitaux et du droit de tuer d'autres hommes. Il s'agit d'un domaine qui est, au sens propre, extra-ordinaire. Ce qui le fonde, ce sont de très anciennes notions juridiques et politiques; elles ont pour noms légitimité et souveraineté. Ce sont elles qui permettent, à l'instant crucial, au détenteur du pouvoir d'engager des moyens militaires de destruction.
La mort est toujours au rendez-vous (...)
Lorsque le même Nicolas Sarkozy envoie des renforts en Afghanistan dans une région tenue par les insurgés, il assume le risque de voir mourir de jeunes Français, tués par l'ennemi. C'est là, pourrions-nous dire, l'ordinaire des jours (...) Il s'agit du pouvoir exorbitant confié à un seul homme d'estimer que la vie de la nation est réellement en danger et, de ce fait, de brandir la menace de frappes nucléaires qui entraîneraient des destructions considérables et des victimes innombrables.
Ce pouvoir ne se partage pas
(...)
Au cœur de la politique se niche la tragédie. On ne peut qu'avoir l'illusion d'y échapper, illusion que l'on enrobe de jolis mots comme la « sécurité collective » ou le « droit international » (...)
Parce qu'elle est tout entière négation de la tragédie, l'Europe ne pourra jamais assumer la responsabilité de la guerre. Or, la défense n'est que le mot aimable pour désigner la « guerre », un mot que d'aucuns trouvent encore trop belliqueux, lui préférant celui de « sécurité ». Il n'est d'ailleurs pas anodin que les institutions européennes mélangent autant les mots sous les acronymes de PESD (politique européenne de sécurité et de défense) et de PESC (politique étrangère et de sécurité commune) (...)
Rappelons quand même que ce n'est pas une idée neuve et encore moins moderne: cela fait plus de mille ans qu'on en parle sur ce continent et que certains de ses habitants ont tenté à plusieurs reprises de le construire sous des formes diverses. C'est l'idée de l'Empire, une nostalgie jamais éteinte de la Rome antique.

Le rêve est toujours là, mais il reste un rêve, qui, parfois, a viré au cauchemar.

Ce qui est bien réel, en revanche, c'est que la guerre n'a pas disparu de notre horizon et que l'Europe qui se construit concrètement à Bruxelles est, de par sa nature même, incapable de relever de tels défis. Mieux vaut donc aujourd'hui ne pas désarmer Pierre pour faire semblant d'habiller Paul".

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