Sauf que chez nous, dimanche dernier, on a eu les deux.
On aime ça, nous autres, l'opulence à table, précédée par la flatulence sur le canapé.
Mais pour l'heure, on était à table, à l'entrée.
Une belle salade de riz, jolie, jolie, jolie.
Un super pot de mayonnaise.
Et...
Une barquette d'aïoli artisanal. Enfin non, plutôt ailloli, puisqu'on recevait la partie catalane de l'Espagne.
Une éternité que j'avais pas trempé quoi que ce soit dans de l'ailloli.
Un bail léonin que j'avais pas tartiné un quignon avec.
Alors forcément, quand j'ai croqué, j'ai pas pu m'empêcher de parler la bouche pleine.
"Putain, alors là les enfants, j'ai 8 ans, je suis sur le port, avec tous les copains pêcheurs et petits métiers de l'époque, devant la grille géante, enfumée par la cargolade."
L'émotion me rend grossière.
Mais j'en ai rien à foutre, je suis au bord de la mer, en monokini et nouilles à paillettes aux pieds et encore, les vilains messieurs qui aiment les enfants n'étaient pas légion.
Enfin, c'est ce que je crois. Parce qu'autour de moi, en vrai de vrai, j'ai mes invités, leurs enfants aux oreilles chastes, le conjugué et les 2 tiers de la tribu dont l'interné, qui a jugé bon de nourrir le moment de sa culture.
"Ah ça, c'est une réminiscence proustienne, la fameuse madeleine de Proust, dans Du côté de chez Swan, et la légende raconte qu'en fait, il s'agissait d'une tartine de pain grillé et non d'une madeleine."
Ils sont tous restés estomaqués par tant de savoir littéraire du caisson de basses.
Sauf mon quignon, ma barquette d'ailloli et moi, qui nous appliquions à nous tendre la peau du ventre.
C'était sans compter le conjugué, plombeur de l'ambiance de café-littéraire qui régnait alors sur la salle à manger.
"Ouais, bon, en même temps, une madeleine de Proust à l'ailloli, on a connu plus glamour pour la suite des festivités, t'as pas d'autres souvenirs avec genre je sais pas moi, des frites?"