Lazaret

Publié le 07 juin 2009 par Lephauste

J'ai dénudé les parois de la caverne, le parloir de la solitude. J'ai fait qu'à Lascaux comme au Tassili l'homme ne soit plus le fruit de son milieu puis je me suis peuplé d'un surplus d'ombre tout en en appelant à la lumière, la pâle lumière de l'entendement humain. J'ai redéfinis l'espace de la caverne en un labyrinthe de voeux et de désirs maladifs, je me suis invité à des célébrations creuses et sonnantes comme le glas et les prières de lamentation. J'ai pris à pleines mains les cendres chaudes de la haine de soi et m'en suis fait un fardeau pour les épaules, là où pas d'ailes battent comme la matraque. J'ai marché alors, vouté mais j'ai marché, autour du pourtour de la caverne, entre les enseignes, les vies promues à de promptes soldes, les rognures du règne animal, les flores carnivores. J'ai marché en maugréant, de la colère moussant dans la salive, j'ai marché, même face contre terre j'ai marché. Et beaucoup d'assis, de fauteuils profonds ont croisé ma route et beaucoup d'enfants m'ont moqué car je leur faisais peur. Et de nombreuses allongées nonchalantes m'ont seriné le tendre dard du désir. Mais je marchais, allongé à leur côtés je marchais, je continuais à marcher. J'ai jeté à la mer un peu des cendres, aux rivières un peu de cendre, aux ruisseaux je faisais des moulins d'un bois mort et de quelques plumes abandonnées. Mais mes épaules ne se redressaient pas. La caverne malgré les appats du labyrinthe restait une voute, sous laquelle comme à Lascaux, comme au Tassili il faut pour vivre en son milieu savoir un peu du chemin des étoiles.

Alors je me suis arrêté devant une porte, engravée de plaintes et d'appels, au dessus de laquelle un panneau disait : Lazaret. Et  je me suis assis au bout d'un bas-flanc sur lequel reposaient les empreintes de nombres de marcheurs. Des empreintes qui attendaient qu'on les chaussa. Pour que l'homme ne perde pas de vue, sous son manteau de cendres qu'il n'y a qu'à marcher qu'il s'entende encore comme un être gratuit.

Question de mon fils, l'autre Dimanche : Dis moi un truc P'pa, pourquoi tu ne m'as pas encore appris à voler une voiture? Ça doit être parce que tu m'as dit que tu voulais devenir luthier. On s'en sort parfois comme on peut, avec son passé. Et avec les questions embarassantes de ceux qui seront sans que nous y soyons.