Vaccination

Publié le 08 juin 2009 par Bonneau
Elle est arrivée comme une bombe.
Aux cris des poules de la mère Cheval, j’ai compris qu’elles l’avaient échappée belle.
Elle s’est arrêtée dans la cour en faisant sauter les graviers. Son espèce de voiture avait des dents de tigre et des pneus quasiment si gros que ceux de mon tracteur.
Je suis sorti sur le devant de ma porte.
Elle est descendue de voiture en tirant derrière elle un gniard d’une dizaine d’année. Rien qu’à sa tenue on savait déjà qu’elle était pas rémiste. Ses cheveux étaient blonds filasse et coupés au raz.
Elle est venue vers moi d’un air décidé : « Je cherche monsieur Bonneau ».
« C’est moi » que j’ai répondu.
« Vous êtes bien praticien traditionnel de médecine énergétique ? ».
J’ai failli en tomber sur le cul !
« Je suis paysan, avant tout et rebouteux - guérisseur à mes moments perdus ».
« C’est pareil a-t-elle coupé d’un ton sec ».
J’ai senti qu’on allait pas s’entendre.
« Je suis pour le retour aux valeurs naturelles et à la médecine traditionnelle. Je refuse de me laisser exploiter par les médecins et les grands laboratoires pharmaceutiques qui les gouvernent et qui nous empoisonnent avec leurs médicaments. ».
« Et alors ? » que j’ai dit en passant ma main sur ma joue pour constater que je ne m’étais pas rasé ce matin. Ca devait pas bien la gêner, au contraire, ça fait plus « naturel ».
« Voila, nous allons partir, en famille, passer des vacances au Sri Lanka. Les amis avec lesquels nous partons n’arrêtent pas de m’assommer avec leurs vaccinations. Ils disent que ce n’est pas prudent de partir avec un enfant de cet age non vacciné. En plus ils veulent que nous prenions un médicament contre le paludisme. Pouvez-vous faire quelque chose dans ce cas. Je ne sais pas moi, renforcer nos défenses naturelles, nous donner de l’énergie positive ou quelque chose dans ce genre ».
J’ai réfléchi quelques instants en continuant de me gratter le poil.
« De toute façon il a déjà les vaccinations obligatoires ! »
Après un instant d’hésitation elle a répondu : « Non, un médecin homéopathe, qui est opposé aux vaccinations, nous a fait un faux certificat ».
Alors là, elle tombait bien. Justement qu’on avait discuté de ce sujet, il y a moins d’un mois, avec le Jean-Pierre (c’est mon gendre le zététicien). Sur ce sujet on était quasiment d’accord.
J’ai réfléchi deux minutes, je lui ai souris et j’ai dit : « Ma petite dame, vous vous êtes trompée de porte. Ne comptez pas sur moi, ni d’ailleurs sur personne de raisonnable, pour ce genre de choses. Je vais vous dire, j’ai 72 ans ; ça veut dire que j’ai connu le temps ou il y avait encore de la variole. On était obligé de se vacciner et, bon dieu, je vous jure que c’était pas une partie de plaisir. Vous voyez cette cicatrice sur mon bras, c’est la vaccination pour la variole. J’ai eu de la fièvre pendant 2 jours et une cloque énorme sur le bras pendant plus d’une semaine. Grâce à ça, la variole a disparue de la terre entière et vous n’êtes plus forcée de vacciner votre gamin. J’avais un copain à l’école primaire. Il s’appelait Robert. Il a attrapé la poliomyélite. Il est mort à 55 ans après avoir passé 40 ans dans un poumon d’acier. Sans compter tout ceux que je connais et qui marchent encore en boitant ou sont dans un fauteuil roulant. Alors si c’est ça que vous souhaitez pour votre fils, je vous félicite ».
« Je sais tout cela et je ne suis pas contre les vaccinations mais je pense qu’on doit laisser la liberté de ne pas se vacciner à ceux qui ne veulent pas ».
Alors là j’ai vu rouge.
« Ça c’est la pire des saloperies : que les autres se vaccinent pour faire disparaitre les maladies et que vous puissiez en profiter sans risque. C’est de l’égoïsme pur et simple. Allez, partez d’ici, et si un jour votre gosse meurt – au Sri Lanka ou ailleurs – faute d’avoir été vacciné, vous aurez le plaisir de ne pas avoir participé a l’enrichissement de fabricants de vaccins. Vous enrichirez juste les pompes funèbres et les fabricants de cercueil. »
Elle a pincé son bec, est remontée dans son 4X4 et est repartie en trombe en manquant d’écraser ce pauvre Pateau qui était venu aux nouvelles en entendant nos éclats de voix.
Je dois dire que j’étais pas mécontent de moi.