Croutches!

Publié le 17 mars 2009 par Camionneuse
Yuma Arizona. Jeudi 5 mars 2009
— « Croutche! ».
La salade crie « croutche » quand je lui plante mon thermomètre dans le cœur. Pour les 55 prochaines heures, on prendra soin que vos icebergs ni ne gèlent, ni ne flétrissent. Vos laitues couleur de glacier seront maintenues entre 34 et 38 degrés. Je lis 37 degrés sur le thermomètre, c’est parfait, vous les aimerez et elles « croutcheront » bien sous vos dents, mais si j’étais vous, j’enlèverais les premières feuilles : c’est un voyage en vrac et elles ne sont pas protégées individuellement sauf dans une méga boite de carton.

— « Croutche! »

a hurlé mon genou, quand j’ai atterri les deux pieds sur le sol, en descendant de la remorque. Le gauche a flanché. Tout ça pour des icebergs! Moi qui n’en achète jamais. Ça n’a pas fait mal tout de suite, mais quand j’ai essayé de marcher, je me suis effondrée et j’ai pleuré. J’avais 53 pieds à marcher jusqu’à la cabine et j’étais incapable, trop douloureux. Un chauffeur a beuglé et frappé sur le camion pour réveiller Richard en catastrophe. Quand mon coéquipier de vie a repris ses esprits, il a bien évalué le niveau d’urgence en me questionnant: ma douleur irradiait, mais je savais que je n’en mourrais pas car je ne suis pas un homme! ;c) Comme il n’y avait pas de place de stationnement au truckstop de Yuma et qu’on ne pouvait le mettre nulle part, ce gros camion, Richard a tenté le coup pour l’hôpital. Muni de son super GPS, il a repéré l’hôpital le plus près. (C’est promis je ne le ridiculiserai plus jamais ton GPS, Richard. Je répète en boucle : « -ce n’est pas un gadget, ce n’est pas un gadget, ce n’est pas un gadget ») et il a transformé le semi-remorque en ambulance, rien de moins.
10 minutes plus tard, sur le boulevard en face de l’urgence, mon chauffeur d’ambulance est descendu pour chercher un fauteuil roulant, mais il est vite revenu avec une camionnette de sécurité qui nous a escortés directement à l’entrée : encore mieux que dans un hôtel de 5 étoiles! Ah! Ces Américains, ils « think big » pas à peu près! La rampe d’urgence a la capacité d’accueillir les semi-remorques chargé de 20 tonnes de laitue!
On m’attendait déjà avec un fauteuil et l’on m’a fait rouler les quelques mètres qu’il restait jusqu’au triage. Il n’y a pas même pas de salle d’attente à l’urgence, tout est trop vite!
Cruchtes.
C’est ce que le médecin de l’urgence de Yuma m’a prescrit. Je ne savais pas ce que c’était. Je l’ai appris sur le champ, quand l’infirmière m’a apporté des béquilles et une attèle pour le genou qui faisait « croutche croutche » quand on m’installait les velcros.

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Depuis plus d’une semaine déjà, je suis en arrêt de travail pour une durée indéterminée. Ça me donne l’occasion de faire plein de trucs qui trainaient dans mon ordinateur, comme de retravailler sur de vieux textes. Je marche péniblement, mais ça va. Je vous tiens au courant et j’attends le printemps comme vous, mais en boitant un peu.