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"La déshumanisation s’accélère"

Publié le 09 juin 2009 par Micheljanva

Dans une tribune publiée par La Croix le 9 juin 2009, Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme Lejeune, réagit au rapport du Conseil d'Etat sur la révision de la loi de bioéthique, sur deux sujets emblématiques : la recherche sur l'embryon et le diagnostic prénatal :

"Il paraît que les religions accueilleraient favorablement le rapport du Conseil d’Etat sur la bioéthique. Cela m’étonnerait fort de la part de la religion catholique (...) En effet, rien dans le rapport ne peut justifier pareil optimisme. Sur les deux sujets cruciaux, la recherche sur l’embryon et le diagnostic prénatal, le Conseil d’Etat fait des propositions irrecevables sur le simple terrain de la logique. Sans même parler d’éthique.

S’agissant de la recherche sur l’embryon, le constat s’impose que l’Agence de la biomédecine (ABM) n’a respecté aucun des deux critères posés par la loi de 2004 pour déroger au principe de l’interdiction de la recherche sur l’embryon : ni l’exigence de progrès thérapeutique majeur ni celle de l’absence de méthode alternative d’efficacité comparable (...) Paradoxalement, c’est l’absence de résultats obtenus par les recherches sur l’embryon qui justifie, pour le Conseil d’Etat, non le retour à l’interdiction sans dérogation ou au moins la reconduction du moratoire auxquelles on s’attendrait, mais le passage à un régime d’autorisation pérenne, au motif que la durée de cinq ans « priverait les acteurs de la visibilité nécessaire » et que « la notion d’efficacité ne serait pas pertinente pour juger d’un projet de recherche ». Il ressort de cette proposition le sentiment affligeant qu’il faut « donner ses chances » à la recherche sur l’embryon, fût ce au prix de l’efficacité (...)

Sur le sujet du diagnostic prénatal, le Premier ministre s’était inquiété de savoir s’il respectait effectivement le « principe prohibant toute pratique eugénique ». D’un côté le Conseil d’Etat constate : « l’eugénisme peut être le résultat collectif d’une somme de décisions individuelles convergentes prises par les futurs parents (...) Le cas de la trisomie 21 appelle à la vigilance : en France, 92 % des cas de trisomie sont détectés, contre 70 % en moyenne européenne, et 96 % des cas ainsi détectés donnent lieu à une interruption de grossesse, ce qui traduit une pratique individuelle d’élimination presque systématique des fœtus porteurs ». D’un autre côté, il donne son feu vert à la mise en œuvre d’un nouveau dispositif de dépistage de la trisomie 21, préconisé par la Haute autorité de santé (HAS), plus précoce, et qui va renforcer l’eugénisme.

Sur ces deux sujets cruciaux, le Conseil d’Etat se soumet à des autorités techniques (ABM et HAS) et nous prive de plus value éthique. A quelques semaines de la clôture des Etats Généraux de la bioéthique il faut s’interroger : à quoi sert la bioéthique s’il ne s’agit que d’enregistrer les demandes de la techno-science et de l’ultra libéralisme ? Plût au Ciel que les religions ne s’accommodent pas de ce recul d’humanité et que le Parlement envisage ces enjeux à la lumière de la raison et de sa mission de protéger les plus fragiles."


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