par un roi du Portugal éperdu de chagrin
Mon aimée, est-ce bien toi qui t’en es allée ?
N’est-ce pas moi en réalité ?
Je ne t’ai laissée que quelques jours
autant dire un instant
un instant où mon royaume compta plus que toi
où je dus aller faire mon métier de roi
où il fallut que je me batte avec ton image
où ton regard brûlant consumait des citadelles.
Au moment où je faisais tomber une place forte
l’affreuse dague te transperçait
et ton sang se répandait dans tout le palais, noir
comme l’âme de ces sinistres valets.
A cet instant même, sous le feu des couleuvrines
je versais de mon cheval
frappé par une douleur dans la poitrine.
Amour, je te promets un beau couronnement !
Un vent cinglant balaie mon trône de sable.
Je ne voulais rien perdre et je t’ai perdue…
Le Don total que tu me fis
était le vrai sens de ma quête, mon Graal
et je ne l’ai pas vu, je n’en ai pas voulu !
Maintenant seulement j’en connais le prix.
Faut-il que les rois ne soient que des hommes
pour être aussi aveugles ?
Sourds à leurs propres sentiments,
comment pourraient-ils faire le bonheur de leur peuple ?
Ma couronne de sang, trop lourde pour ma tête
a roulé dans le ciel embrasé du couchant,
désormais le bleu triomphal de notre azur n’est plus
qu’un éternel crépuscule.
Tu étais le Jour sans voile
le quatrième Pilier du Temple
la Bonté pure.
Tu étais l’Astre auquel mon âme aspirait
et moi je ne voyais que ta beauté !
Tout était nouveau, puisque tu changeais tout.
Mais nous étions trop la Vie pour que ces êtres de basse fosse
nous épargnent.
Que n’ai-je su te mettre à l’abri de leur haine !
Mon royaume, je le donne au cheval écumant
Mascaret du destin qui m’emporta loin de toi.
Mon trône de sable, je le laisse au vent cinglant
auquel nulle civilisation ne résiste.
Un parfum délicieux flotte dans le désert.
J’oublie la soif puisque je suis sur ta piste.
Dérisoires ténèbres qui croient nous séparer…
Le rire d’un fou résonne dans le palais des nuées.
Jean Gennaro