Observateur averti des états généraux de la bioéthique et auteur de la Bioéthique et l'embryon, Pierre-Olivier Arduin décrypte pour nous une bien curieuse déclaration faite par l’ancien ministre de la Santé Jean-François Mattéi à l’occasion du premier “forum citoyen” des états généraux de la bioéthique à Marseille le 9 juin dernier :
"À l’interrogation d’un membre du jury citoyen sur l’opportunité de définir précisément un statut pour l’embryon, l’ancien ministre de la Santé a répondu que cette question, bien que récurrente, était totalement « archaïque » (...) Pour contourner la problématique lancinante du statut de l’embryon, Jean-François Mattéi s’est rabattu sur un argument pratique extrêmement intéressant à analyser : l’emploi massif du dispositif intra-utérin (DIU) par les Françaises. Et de rappeler devant une salle médusée que le stérilet, en empêchant la nidation d’embryons humains, en détruit un grand nombre, ce qui à l’évidence ne choque personne aujourd’hui et ne suscite aucune polémique (...)
Celui-ci se place en définitive sur la même ligne que l’enseignement de l’Église en matière de bioéthique, actualisé il y a peu dans l’Instruction Dignitas personae. Les auteurs de ce document romain rappellent en effet que « l’avortement est le meurtre délibéré et direct, quelle que soit la façon dont il est effectué, d’un être humain dans la phase initiale de son existence » (n. 24). Peu importe que l’embryon soit détruit par la recherche scientifique dans un laboratoire ou par un stérilet dans l’utérus puisque le moyen employé, in vitro ou in vivo, conduit à la mort du jeune être humain dans les deux cas de figure. La matérialité de l’acte change mais sa qualification morale est la même. Dire cela en public est une petite révolution.
En disant cela, l’ancien ministre de la Santé va à l’encontre de la vulgate dominante qui a toujours présenté le dispositif intra-utérin comme un simple moyen contraceptif (...) Le ministère de la Santé ne devrait-il pas tenir compte de l’objection du professeur Mattéi pour informer avec exactitude les femmes en leur disant la vérité sur le stérilet ? Et puisqu’il s’agit d’une technique abortive précoce, le législateur ne devrait-il pas accorder une clause de conscience à son endroit à tous les professionnels de santé, pharmaciens y compris ?"