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Jean Clair, un écrivain de l'art sous la Coupole

Publié le 22 juin 2009 par Lauravanelcoytte

Pour applaudir, jeudi, le discours de réception de Jean Clair sous la Coupole, la famille et les amis de l'écrivain et historien d'art étaient nombreux. Parmi eux figuraient des personnalités aussi diverses que Françoise Cachin, Régis Debray, Ernest-Antoine Seillière, Antoine Gallimard, la comtesse Klossowska, veuve de Balthus, ou encore Mme Piero Crommelynck, veuve du graveur de Picasso, une femme qui fut peinte à plusieurs reprises par le maître.

Avec Jean Clair, l'Académie française reçoit une personnalité forte et atypique. Un homme aimant la polémique, toujours prêt à dénoncer les dérives de l'art contemporain, qui vont de pair avec celles d'une époque où la culture est, selon lui, terriblement malmenée.

Organisateur d'expositions, ancien directeur du Musée Picasso (1989-2005), historien de l'art, Jean Clair aurait finalement aussi bien pu être accueilli à l'Académie des beaux-arts. Ce que soulignait d'ailleurs Marc Fumaroli, dans sa réponse au discours de réception du nouveau venu, avant d'expliquer : «À l'évidence, c'est cette œuvre d'écrivain et d'essayiste qui vous a valu les suffrages de notre Compagnie, même si votre carrière si originale dans le monde des musées et le savoir que vous mettez au service de vos goûts n'ont pas nui à votre cause.»

Le nouvel immortel, installé au fauteuil de Bertrand Poirot-Delpech, possède une double personnalité. N'a-t-il pas pris un pseudonyme à l'occasion de la parution de son premier ouvrage ? Né Gérard Régnier le 20 octobre 1940 à Paris, il changeait d'identité en 1962 en signant «Jean Clair», son premier roman, Les Chemins détournés, publié par Gallimard. Depuis, le professionnel de l'art et l'écrivain ne se sont plus jamais quittés.

Des racines terriennes

Pour comprendre le parcours de Jean Clair, il faut remonter à ses racines terriennes. Lui, le natif de Paris, élevé à Pantin, n'en est pas moins un fils de paysans installés dans la capitale. Les odeurs de la campagne, la beauté de la nature ont ainsi bercé l'enfance du futur lettré, à l'occasion des vacances qu'il passait dans le Morvan, chez les membres de sa famille restés loin de la ville.

Pur produit de la méritocratie républicaine, Jean Clair fut élève aux lycées Jacques-Decour et Carnot, avant d'entrer en khâgne au lycée Henri IV. Boursier, il décrocha par la suite un doctorat ès lettres à la Sorbonne, où il fut l'élève de l'historien de l'art André Chastel et du philosophe Jean Grenier. Il obtint également un doctorat de philosophie en art à Harvard.

Jean Clair fut reçu au concours de conservateur en 1966, et il sera conservateur assistant des Musées de France jusqu'en 1969. Il deviendra ensuite conservateur au Musée ­national d'art moderne pendant dix ans, et du cabinet d'art graphique du Centre Georges-Pompidou entre 1980 et 1989.

Se joua ensuite un véritable tournant dans la carrière et la pensée de Jean Clair. Il écrivit ainsi en 1983 son chef-d'œuvre avec ses Considérations sur l'état des beaux-arts. Un ouvrage dans lequel il dresse une critique à la fois sévère, juste et fine de l'art moderne.

Jean Clair serait-il devenu réactionnaire avec le temps, lui qui fut dans sa jeunesse proche de l'Union des étudiants communistes ? Il est en tout cas certain que cet homme de grande culture a su mesurer à sa juste valeur, au fil des ans, l'immense richesse de l'héritage culturel français et européen. Pour ce lettré au regard à la fois joyeux et parfois désabusé, la véritable modernité jaillit du passé.

Jean Clair, parfaitement à l'aise dans son habit vert flambant neuf, concluait d'ailleurs ainsi son discours d'hier, après avoir, selon la tradition, fait l'éloge de son prédécesseur : «Ainsi votre Institut, Mesdames, ­Messieurs, illustre-t-il non pas le passéisme académique mais les débats les plus vifs de la modernité.»

http://www.lefigaro.fr/livres/2009/06/19/03005-20090619ARTFIG00403-jean-clair-un-ecrivain-de-l-art-sous-la-coupole-.php


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