Faire revenir Monique Massier à la barre avait produit son petit effet, du côté de la partie civile comme de celui de l’auditoire. La salle frémissait en se délectant des éléments nouveaux qui ne manqueraient pas de relancer l’affaire. Décidément, les avocats comblaient les lacunes de la police, qui, visiblement avait négligé quantité de détails, arguant du fait que le crime ne comportait aucune aspérité méritant qu’on s’y attarde. Un mort, une accusée. Que demandait le peuple ?
Fabien ne commit pas l’erreur de se mettre les enquêteurs à dos. Aux compliments que lui fit la cour, il précisa avec une belle modestie, qu’il ne remplissait qu’une seule et même mission : découvrir la vérité afin de démontrer que le meurtre, si meurtre il y avait, n’avait pas été prémédité. Qu’en aucun cas, Clotilde Nevers ne s’était rendue à Paris pour tuer son prétendant. Il fit passer aux jurés la photo agrandie de Charles Massier, telle qu’elle figurait sur son avatar : un bel homme d’une trentaine d’années.
« Voici l’homme que ma cliente pensait rejoindre dans la capitale. »
Puis il appela Monique Massier à la barre tandis qu’il faisait passer une nouvelle épreuve, une image cette fois-ci, représentant un loup hurlant à la lune (pleine, il va sans dire). Lorsqu’il la récupéra, l’avocat la remit entre les mains du témoin.
« Madame Massier, connaissez-vous cette image ?
- Maître, une fois de plus, je ne vous suis plus. Oui, sans doute, j’ai du la voir, comme tout le monde ici. Il s’agit d’une image faisant partie de notre iconographie collective, non ?
- Sans doute, madame Massier, sans doute. Mais, vous-même, vous en êtes vous servie, pour une raison ou une autre ?
- Moi ? Excusez-moi, mais cette question est insensée, monsieur le président ?
- Poursuivez maître, madame Massier, contentez vous de répondre aux questions posées sans les commenter, je vous prie.
- Oui je connais cette image, non je ne m’en suis pas servie…
- Comme, je suppose vous n’avez jamais utilisé le pseudonyme de Louve Solitaire sur un site Internet ? »
Une vague de brouhaha s’empara de la salle. Fabien laissa la rumeur se calmer en faisant quelques pas. Lorsqu’il reprit la parole tous les regards étaient suspendu à ses lsèvres. Il brandit alors les deux copies des avatars en s’adressant au Président.
« Les adresses IP des ordinateurs ont révélé une part de la vérité. Vendredi et Louve Solitaire partageaient la même identité mais il s’agit, sans aucun doute possible de deux ordinateurs différenciés. Celui de Vendredi, alias Charles Massier correspond à un portable Macintosh ; celui de Louve solitaire, lui, est un PC fixe, celui du domicile des Massier. On pourrait penser que la perversité de la victime allait jusqu’à créer un double pseudo, pour souffler le chaud et le froid par exemple mais je suis formel : j’ai ici la copie de nombre de commentaires laissés sur le site. Comme vous le constaterez, ces textes ont été déposés simultanément. A moins que notre victime soit Shiva, il ne fait aucun doute que madame Massier connaissait tout de l’activité de son mari. Elle allait jusqu’à y participer, c’est ce que je voudrais qu’elle explique aux jurés. »